1980
vers le jeudi 10 janvier
Trois appelés du contingent affectés au 2e RIMA sont morts d’épuisement en Nouvelle-Calédonie durant une marche forcée imposée par leurs officiers.
dimanche 24 février
Début de la seconde Coupe d’Océanie de football (première en 1973), organisée par la Nouvelle-Calédonie : à Nouméa, dans le groupe B, l’Australie a battu la Nouvelle-Calédonie huit buts à zéro. C’était la première fois que ces deux sélections se rencontraient.
mardi 26 février
Second match du premier tour de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a battu les Nouvelles-Hébrides [Vanuatu] quatre buts à trois.
jeudi 28 février
Dernier match du premier tour de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a écrasé la Papouasie-Nouvelle-Guinée huit buts à zéro. Deuxièmes du groupe B, les Calédoniens joueront le match pour la troisième place.
dimanche 2 mars
Match pour la troisième place de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a battu les Fidji deux buts à un.
lundi 3 mars
Finale de la seconde Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, l’Australie a battu Tahiti quatre buts à deux. C’était la première fois que ces deux sélections s’affrontaient. Avec cinq réalisations chacun, les Australiens Ian Hunter et Eddie Krncevic sont les deux meilleurs buteurs de la compétition.
vendredi 20 juin
Devant la situation de crise en cours aux Nouvelles-Hébrides, la France a décidé d’envoyer des renforts, une compagnie de la 11e division de parachutistes, en Nouvelle-Calédonie.
mardi 16 septembre
Le ministère de la Défense a pris des sanctions à l’encontre de quatre officiers du 2e régiment d’infanterie de marine, en poste à Nouméa. Les quatre hommes commandaient une marche forcée au cours de laquelle trois appelés du contingent étaient morts d’épuisement en janvier dernier.
vendredi 12 décembre
Le tribunal permanent des Forces armées de Rennes a condamné deux officiers du 2e RIMA, un capitaine et un lieutenant, à six mois de prison, dont trois avec sursis pour l’affaire de la « marche forcée de Nouméa ». Un sergent-chef a écopé d’une peine de trois mois de prison, dont deux avec sursis, tandis que le quatrième inculpé, un sergent, a été relaxé. Trois appelés du contingent étaient morts d’épuisement en janvier dernier lors d’un exercice très dur dans la brousse de Nouvelle-Calédonie. Les peines infligées sont inférieures à celles requises par le commissaire du gouvernement.
1981
mercredi 8 avril
L’indépendantiste marxiste Nidoïsh Naisseline fonde en Nouvelle-Calédonie le parti Libération kanak socialiste à la suite d’une scission du Parti de libération kanak (Palika) au sein du Front indépendantiste, jugé trop proche du Parti socialiste.
dimanche 10 mai
Second tour de l’élection présidentielle : Valéry Giscard d'Estaing (UDF) recueille 65,5 % dans l'île, mais c'est le socialiste François Mitterrand qui est élu.
dimanche 14 juin
Elections législatives : 40,21 % d'abstentions. UDF-RPR 61,39 %, divers gauche 37,08, MRG 0,12. Elus : un apparenté PS et un apparenté RPR.
vendredi 19 juin
Démission de l’archevêque de Nouméa Mgr Eugène Klein. Agé de 65 ans, il était à la tête de l’archevêché de Nouvelle-Calédonie depuis 1972. Son évêque auxiliaire Mgr Michel Calvet (37 ans) est aussitôt nommé pour lui succéder.
jeudi 23 juillet
Le président Mitterrand a reçu à l’Elysée une délégation de l’Union calédonienne (indépendantistes de Nouvelle-Calédonie).
samedi 19 septembre
Pierre Declercq, secrétaire général de l’Union calédonienne (UC) et partisan de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, a été assassiné à son domicile de Robinson, près de Nouméa. Il avait 43 ans (ses meurtriers ne seront jamais retrouvés). Une importante manifestation de Kanaks est organisée en sa mémoire.
samedi 7 novembre
Une manifestation d’indépendantistes dégénère en émeutes à Nouméa : les vitrines de magasins appartenant à des Européens ont été brisées et des boutiques pillées.
mercredi 11 novembre
Une manifestation anti-indépendantiste a rassemblé 20 000 personnes à Nouméa.
mercredi 9 décembre
Christian Nucci devient haut-commissaire.
lundi 21 décembre
Réforme foncière.
1982
mercredi 20 janvier
Loi permettant au gouvernement de prendre des ordonnances jusqu'au 1er janvier 1983.
en février
Réforme fiscale.
vendredi 18 juin
Les indépendantistes, associés aux centristes, sont majoritaires au sein du nouveau conseil du gouvernement désigné par l’assemblée territoriale.
en juin
Jean-Marie Tjibaou devient vice-président de l’Union calédonienne et vice-président du conseil gouvernemental.
jeudi 22 juillet
En Nouvelle-Calédonie, des militants anti-indépendantistes ont envahi l’Assemblée territoriale, à Nouméa. De violentes bagarres ont éclaté : 17 gendarmes ont été blessés. 13 personnes ont été arrêtées.
dimanche 5 septembre
Jacques Lafleur est réélu député avec 91,95 % des voix.
1983
lundi 10 janvier
2 gendarmes mobiles ont été tués dans une embuscade tendue à La Foa par des Mélanésiens armés de fusils, suite à un conflit entre une société forestière et les tribus locales, à 120 kilomètres au nord-ouest de Nouméa. 6 autres personnes ont été blessées. Les autorités et les partis politiques appellent au calme (on recense 18 morts parmi les forces de l'ordre depuis 10 mois).
mardi 11 janvier
Retour au calme en Nouvelle-Calédonie, avec en parallèle une vaste opération de gendarmerie : 15 Mélanésiens ayant reconnu avoir participé à la fusillade de la veille ont été interpellés. Le haut-commissaire dans l’île, Jacques Roynette, a fait interdire la vente et le port d’armes, y compris les armes blanches, pour une durée indéterminée.
vendredi 14 janvier
Importante manifestation à Nouméa, à l’appel des partis de droite, en hommage aux deux gendarmes tués il y a quatre jours.
samedi 15 janvier
4 000 personnes ont assisté aux obsèques à Nouméa des deux gendarmes tués le 10 janvier.
mercredi 11 mai
Regain de tension en Nouvelle-Calédonie : un jeune Kanak a été tué d’un coup de fusil par un ancien employé d’origine européenne d’une société du nickel.
vendredi 13 mai
Plusieurs manifestations d’indépendantistes se déroulent dans l’île depuis trois jours.
samedi 14 mai
Nouvelle manifestation indépendantiste, dans le calme, en Nouvelle-Calédonie.
mercredi 18 mai
Manifestations sans précédent en Nouvelle-Calédonie : à l’occasion de l’arrivée à Nouméa du secrétaire d’Etat aux DOM-TOM, Georges Lemoine, environ 8 000 indépendantistes kanaks et 30 000 anti-indépendantistes ont défilé dans les rues de Nouméa, chacun de leur côté, sans incident notable.
vendredi 20 mai
Fin de la visite en Nouvelle-Calédonie du secrétaire d’Etat Georges Lemoine. Il est parvenu à ménager à la fois les indépendantistes et leurs opposants : il n’exclut pas l’indépendance du territoire mais pour y arriver il faudra un consensus de la population…
vendredi 8 juillet
Ouverture prés de Paris de la Table ronde de Nainville-les-Roches (Essonne) entre le Front indépendantiste de Nouvelle-Calédonie, emmené par Jean-Marie Tjibaou, le RPCR anti-indépendantiste de Jacques Lafleur et le gouvernement français représentant par le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer Georges Lemoine.
mardi 12 juillet
Clôture de la Table ronde de Nainville-les-Roches : le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer reconnaît aux Kanaks leur « droit inné et actif à l’indépendance ».
vendredi 23 septembre
Violences en Nouvelle-Calédonie entre Kanaks et les populations d’origine européenne.
en septembre
Création de la compagnie Air Calin (Air Calédonie International).
vendredi 2 décembre
Air Calin commence ses activités avec un Boeing 747 entre Melbourne et Nouméa en association avec Qantas : « Caledonian Express ».
vendredi 23 décembre
L’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie rejette un avant-projet de statut d'autonomie.
1984
lundi 16 avril
Création en Nouvelle-Calédonie de la fédération locale du Front national, dirigée par le Kanak François Néoeré.
jeudi 3 mai
Un projet de loi sur un nouveau statut d’autonomie interne pour la Nouvelle-Calédonie a été adopté en Conseil des ministres. Un scrutin d’autodétermination pour la population locale est prévu d’ici cinq ans.
mardi 31 juillet
Vote par l’Assemblée nationale du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, préparé par le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer Georges Lemoine.
jeudi 6 septembre
Entrée en vigueur du « Statut Lemoine » qui renforce fortement l’autonomie de la Nouvelle-Calédonie et prévoit l’organisation d’un référendum sur l’avenir institutionnel de l'archipel (indépendance ou non) dans les 5 ans. Les institutions précédentes (gouvernement local et Assemblée territoriale), sont maintenues avec des prérogatives augmentées. Création de 6 circonscriptions sur la base des aires coutumières, avec chacune une assemblée de pays consultative composée de 24 représentants de la coutume et de 24 représentants des communes.
du samedi 22 au lundi 24 septembre
Le Front indépendant est reconstitué en Front de libération nationale Kanak et socialiste (FLNKS), rassemblant l'UC, le FULK, l'UPM, le PSK et le Palika. Ce nouveau mouvement, toujours conduit par Jean-Marie Tjibaou, rejette le statut Lemoine, exige un référendum où seuls les Kanaks auront le droit de participer et appelle au boycott des élections et des institutions.
en octobre
Barrages routiers, violences.
dimanche 18 novembre
Elections territoriales en Nouvelle-Calédonie, marquées par la violence et les barricades du FLNKS : 49,87 % d'abstentions (le FLNKS a appelé au boycott). Le RPCR, proche du RPR, arrive largement en tête avec 70,87 % des suffrages (34 sièges, + 19), LKS 7,33 % (6 s.), FN 6,05 % (1 s.), Fédération pour une nouvelle société calédonienne 4,44 % (1 s., - 6), Front indépendantiste 0 % (0 s., - 14). Des militants indépendantistes ont été arrêtés après avoir tenté de s’opposer à l’organisation du scrutin. Eloi Machoro, secrétaire général de l’Union calédonienne, a brisé une urne à Canala à coup de tamiok (hache de guerre traditionnelle).
nuit du lundi 19 au mardi 20 novembre
Deux gendarmeries ont été occupées par des indépendantistes kanaks, qui réclament la libération de leurs camarades arrêtés. Des armes ont été prises avant d’être restituées aux forces de l’ordre.
mardi 20 novembre
En Nouvelle-Calédonie, deux cents militants FLNKS, menés par Eloi Machoro, occupent la mairie de Thio. Les propriétaires caldoches sont désarmés. D’autres incidents se produisent à Ponérihouen et Ouvéa. Le haut-commissaire en Nouvelle-Calédonie a lancé un appel au calme.
jeudi 22 novembre
La tension s’accroît en Nouvelle-Calédonie : pris à partie par des indépendantistes, quatre CRS ont été blessés par balles. Les kanaks maintiennent leurs barrages aux alentours de Nouméa et sabotent des lignes à haute tension (les 15 000 habitants du Mont Dore, près de Nouméa, ont été privés d’électricité pendant plusieurs heures). Par ailleurs, le sous-préfet des îles Loyauté a été fait prisonnier dans l’île de Lifou : ses geôliers, membres du FLNKS, réclament notamment l’annulation des élections territoriales
vendredi 23 novembre
Renforcement du maintien de l’ordre en Nouvelle-Calédonie : trois escadrons de gendarmerie mobile sont envoyés en renforts dans l’île et des blindés militaires patrouillent dans les rues de Nouméa. Le haut-commissaire a interdit les manifestations.
samedi 24 novembre
Les incidents se multiplient en Nouvelle-Calédonie : bâtiments incendiés dans le nord de l’île, gendarmeries occupées dans l’est par des membres du FLNKS. Les moyens de communications restent bloqués par la présence des nombreux barrages depuis une semaine.
dimanche 25 novembre
Les indépendantistes kanaks ont formé un gouvernement provisoire. Cinq anciens Premier ministres gaullistes (Chaban-Delmas, Chirac, Couve de Murville, Debré et Messmer) ont lancé ensemble un appel solennel au président Mitterrand pour que soient respectés les institutions et le processus démocratique dans l’île ; ils s’opposent à ce que le gouvernement accélère le processus d’indépendance du territoire. Toute la journée, à l’occasion de la discussion du budget des DOM-TOM (dont le vote a été repoussé), les sénateurs RPR, en particulier Charles Pasqua et Yvon Bourges, ont durement pris à partie le secrétaire d’Etat Georges Lemoine. Ce dernier a rappelé que le but du gouvernement était de trouver une solution avec tous les gens sérieux. Invité du Club de la presse d’Europe 1, le ministre de l’Intérieur Pierre Joxe a déclaré que le dialogue était indispensable.
mardi 27 novembre
Arrivée en Nouvelle-Calédonie de l’émissaire spécial du gouvernement, Charles Barbeau. En métropole, la polémique se poursuit sur l’attitude à suivre dans cette affaire : présidents des groupes RPR et UDF à l’Assemblée nationale, Claude Labbé et Jean-Claude Gaudin, ont écrit au Premier ministre pour demander l’organisation d’un débat sur la situation dans ce territoire d’outre-mer. Tout en réclamant le retour à l’ordre, Jacques Chirac s’est dit prêt à soutenir l’action du gouvernement dans l’île si celui-ci respecte les principes démocratiques et républicains. Le groupe communiste à l’Assemblée s’est déclaré favorable à un référendum d’autodétermination anticipé.
jeudi 29 novembre
Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, un fermier européen de 70 ans a été roué de coup par une quinzaine de Kanaks et laissé pour mort tandis que son épouse a été blessée par balle lors de leur fuite en voiture de leur maison située en pleine brousse. Dès la matinée, la gendarmerie de la région avait été occupée par le FLNKS. Par ailleurs, le sous-préfet des îles Loyauté a été libéré dans l’île de Lifou. En France, les leaders de l’opposition réclament le rétablissement dans la région de l’ordre républicain, qui doit passer avant les discussions avec les indépendantistes.
nuit du jeudi 29 au vendredi 30 novembre
Premier décès de la crise qui secoue la Nouvelle-Calédonie depuis quinze jours : un Européen de 56 ans a été tué au cours d’une fusillade entre communautés dans le nord de l’île, à Ouégoa. Les premiers tirs sont partis alors que des Kanaks refusaient d’ouvrir un passage dans l’un de leurs barrages pour laisser passer le convoi qui transférait vers un l’homme âgé blessé quelques heures plus tôt. Les Mélanésiens affirment également que l’un des leurs a trouvé la mort. Six autres personnes ont été blessées. Des commandos de gendarmerie héliportés sur les lieux ont procédé à l’arrestation de quatre Kanaks.
vendredi 30 novembre
Les menaces et les violences de ces dernières 24 heures ont conduit les autorités de Nouvelle-Calédonie à accélérer l’évacuation des familles européennes habitant dans la brousse ou dans certains villages du nord de l’île : femmes, enfants et personnes âgées sont transportées par voie aérienne vers Nouméa. Des maisons sont brûlées et du bétail abattu. Dans la soirée, les indépendantistes ont officiellement mis en place un gouvernement provisoire, avec pour président Jean-Marie Tjibaou. Selon la rumeur, une cinquantaine de mercenaires français et allemands auraient été recrutés pour assurer la protection des caldoches et empêcher « le communisme de mettre la main sur l’île ». Tandis que l’émissaire du gouvernement, Charles Barbeau, quittait l’île pour rendre compte à Paris de sa mission, trois nouvelles compagnies de CRS sont arrivées dans le territoire afin de renforcer le dispositif de gendarmerie. En France, le président du groupe RPR à l’Assemblée nationale, Claude Labbé, affirme que dans cette affaire le gouvernement « a pris la voie du racisme et de l’apartheid tels qu’ils existent en Afrique du Sud ».
samedi 1er décembre
Réuni de façon exceptionnelle, le Conseil des ministres a nommé un délégué pour la Nouvelle-Calédonie, l’ancien ministre (1961-1967) Edgard Pisani, actuel commissaire aux Communautés européennes chargé du développement. Placé sous l’autorité directe du Premier ministre, il exercera également les attributions de haut-commissaire Sa tâche sera en premier lieu de maintenir l’ordre dans l’île tout en continuant le dialogue avec toutes les parties pour parvenir à l’autodétermination, dans le respect des droits de chaque communauté. Dans un délai de deux mois, il devra « proposer au gouvernement, puis de mettre en œuvre, les mesures concernant l’évolution institutionnelle et le développement économique, social et culturel de la Nouvelle-Calédonie ». Le président du gouvernement du territoire, Dick Ukeiwé, proche du RPR, est arrivé à Paris où il s’est entretenu en fin de journée avec le président Mitterrand. Sur le terrain, Nouméa a été décrété « ville morte » par la communauté européenne. Plus au nord, Jean-Marie Tjibaou a proclamé la naissance de la République de Kanakie, constituée d’un contre-gouvernement indépendantiste dont Eloi Machoro est le ministre de la Sécurité. La première levée du « drapeau kanakie » est organisée dans la tribu de La Conception, au Mont-Dore, dans la banlieue de Nouméa. Par ailleurs, deux personnes ont été blessées dans chaque camp à Poya.
dimanche 2 décembre
Laurent Fabius s’est entretenu dans la matinée avec Edgard Pisani. Ce dernier s’est ensuite envolé vers la Nouvelle-Calédonie. Dans l’île, les gendarmes envoyés en renfort pour protéger les Européens de Thio, dans l’est de l’île, ont du reculer et une soixantaine de leurs collègues sont toujours encerclés dans la gendarmerie. Le village est assiégé depuis 15 jours par des militants kanaks.
lundi 3 décembre
Des gendarmes restent bloqués à Thio, dans l’est de l’île, tandis que deux personnes, un chef d’escale d’UTA et un journaliste local, ont été blessées par balles près de Nouméa. A Paris, Dick Ukeiwé a été reçu à Matignon par le Premier ministre. A sa sortie, le président du gouvernement du territoire a accusé les indépendantistes d’y faire régner la terreur, notamment par le biais de « tribunaux révolutionnaires ».
mardi 4 décembre
Arrivée à Nouméa du délégué et haut-commissaire pour la Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani, qui a aussitôt entamé ses consultations. Avant de rejoindre la table des négociations, le FLNKS exige toujours la libération de 15 de ses militants emprisonnés. Une délégation de la commission de contrôle du Sénat, présidée par le RPR Yvon Bourges, est arrivée à son tour quelques heures plus tard dans le territoire. L’évacuation des familles caldoches commencent dans les zones contrôlées par le FLNKS (certains restent sur place bien décidées à se défendre par leurs propres moyens). A Paris, pour la deuxième fois en huit jours, Laurent Fabius a prononcé à l’Assemblée nationale, sur un ton apaisant mais ferme, une déclaration sur la situation dans l’île. L’intervention du Premier ministre, qui a lancé un appel à la trêve politicienne, a été suivie d’un débat, en présence de Dick Ukeiwé. Un consensus est apparu sur le principe d’autodétermination du territoire, mais pas sur son processus. Le socialiste Lionel Jospin a proposé deux référendums séparés pour les deux communautés de Nouvelle-Calédonie ainsi qu’une « indépendance pluriethnique » ; des propositions qualifiées de « magouille électorale dont le PS a le secret » pour Jean-Claude Gaudin ou décision anticonstitutionnelle instaurant « une sorte d’apartheid » selon le RPR Jacques Toubon. Le Parti communiste a mis en garde contre « l’engrenage colonial ».
mercredi 5 décembre
Intervenant à la télévision locale, le délégué du gouvernement en Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a lancé un appel à l’ordre à la population comme préalable à toute discussion. Il a également annoncé le calendrier de son action, sa mission devant être achevée dans deux mois. Dick Ukeiwé a quitté Paris dans la soirée pour rejoindre Nouméa.
nuit du mercredi 5 au jeudi 6 décembre
Une fusillade entre Kanaks et Européens s’est produite à Hienghène, sur la côte est de la Nouvelle-Calédonie : neuf personnes ont été tuées et trois autres grièvement blessées (dont un mortellement). Les victimes sont toutes des Mélanésiens de la tribu Tiendanite et parmi les morts figurent deux frères de Jean-Marie Tjibaou. Les indépendantistes disent être tombés dans une embuscade tendue par huit hommes tandis que leurs adversaires évoquent l’auto-défense…
jeudi 6 décembre
En signe d’apaisement après le drame de la nuit dernière, Edgard Pisani a annoncé la mise en liberté de 17 militants du FLNKS détenus à Nouméa. Répondant à l’appel du délégué du gouvernement, les indépendantistes kanaks ont libéré tous leurs otages et commencé à lever la totalité de leurs barrages dans l’île et le siège des gendarmeries et mairies.
samedi 8 décembre
Le Haut-Commissariat en Nouvelle-Calédonie affirme que la libre circulation est rétablie à peu près partout dans le territoire. A l’exception de Thio, les barrages des indépendantistes sont presque tous levés. Edgard Pisani s’est longuement entretenu dans la journée avec le président du gouvernement local Dick Ukeiwé. Dans l’est de l’île, les funérailles des 10 Kanaks tués il y a quatre jours se sont déroulées à Hienghène.
dimanche 9 décembre
La première rencontre officielle entre les dirigeants du FLNKS et le délégué du gouvernement Edgard Pisani s’est déroulée dans la soirée.
lundi 10 décembre
Arrestation et inculpation en Nouvelle-Calédonie d’un Métis qui a participé à la fusillade de Hienghène. Les derniers barrages qui interdisaient encore l’accès à Thio, village assiégé depuis trois semaines, ont été levés, mais Eloi Machoro assure que ses hommes restent mobilisés et que les fusils sont à portée de main.
mardi 11 décembre
Tenant une conférence de presse, les responsables du FLNKS ont réaffirmé souhaiter une indépendance kanake, ce qui exclut tout partage de la Nouvelle-Calédonie. Envoyé de Jacques Chirac, Bernard Pons est arrivé dans l’île pour vérifier si les déclarations du Premier ministre étaient suivies d’effet : le député RPR affirme que l’ordre public n’est pas encore rétabli. Par ailleurs, six personnes impliquées dans le massacre de Hienghène, cinq Métis et un Mélanésien, se sont rendues au juge d’instruction dans l’ouest du territoire.
mercredi 12 décembre
La situation en Nouvelle-Calédonie est au cœur des débats à l’Assemblée nationale : lors des questions d’actualité, le RPR a interpellé le gouvernement sur ce sujet, l’accusant d’avoir déjà choisi sa solution au problème, c’est-à-dire l’indépendance. De son côté, Edgard Pisani poursuit ses consultations dans l’île, où le calme est totalement revenu. Les discussions préparatoires étant achevées, le délégué du gouvernement estime que le véritable dialogue peut maintenant commencer. Afin de préciser les positions de chacun, il a rédigé deux questionnaires qui s’adressent aux indépendantistes et à leurs adversaires.
vendredi 14 décembre
Le président du gouvernement local, Dick Ukeiwé, a fait savoir qu’il refusait de participer aux consultations générales, mises en place à partir du 15 décembre avec tous les mouvements politiques de Nouvelle-Calédonie, parce que l’ordre n’est pas entièrement rétabli. Pour Edgard Pisani, il s’agit d’un faux-fuyant car le RPCR refuse en fait toute négociation.
samedi 15 décembre
Début en Nouvelle-Calédonie des consultations d’Edgard Pisani avec les différentes forces politiques du territoire : le délégué du gouvernement a d’abord rencontré une délégation conduite par le député RPCR Jacques Lafleur avant de s’entretenir pendant près de deux heures avec le leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou. Au même moment, les barrages faisaient leur réapparition dans l’île à la suite de l’arrestation et l’inculpation de dix Mélanésiens impliqués dans des vols.
nuit du samedi 15 au dimanche 16 décembre
Deux avions d’Air Calédonie ainsi que le bimoteur d’Edgard Pisani ont été gravement endommagés par des inconnus sur l’aéroport de Nouméa. Les appareils, percutés par des camionnettes, ne pourront pas voler avant plusieurs semaines, voir plusieurs mois. Le trafic aérien local est suspendu jusqu’à la vérification de tous les autres avions.
dimanche 16 décembre
Edgard Pisani a reçu trois délégations d’indépendantistes modérés. Trois barrages ont été levés sans incident sur la côte orientale de Nouvelle-Calédonie. Interrogé à la télévision française sur la question calédonienne, le président Mitterrand croit que ce territoire est « appelé à l’émancipation sous une forme d’autonomie ou d’indépendance qu’il doit définir lui-même ».
lundi 17 décembre
Ayant achevé ses consultations en Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani s’apprête à rentrer à Paris. Sur la côte ouest de l’île, à Bourail, un incendie, probablement d’origine criminelle, a grièvement blessé six personnes (trois succomberont à leur blessure). Dans la même localité, un coup de feu a tiré contre une ambulance : deux personnes ont été légèrement blessées.
mardi 18 décembre
Dans une allocution radiotélévisée, le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie a appelé les habitants du territoire à tenir bon et à faire preuve d’esprit de résistance. De son côté, le FLNKS dénonce dans un communiqué « la campagne de calomnie et de désinformation » orchestrée ces derniers jours par le RPCR. Au lendemain du tir contre une ambulance à Bourail, des médecins et représentants des professions paramédicales ont manifesté à Nouméa. En métropole, le RPR poursuit la polémique sur le rôle des gendarmes : Claude Labbé, président du groupe à l’Assemblée nationale, a déclaré que le gouvernement a empêché les forces de l’ordre de faire leur travail dans l’île. Par ailleurs, l’Australie a formellement protesté contre les récentes critiques, jugées « offensantes » et « déplacées », du président Mitterrand contre la position du gouvernement de Canberra sur la Nouvelle-Calédonie.
mercredi 19 décembre
Les débats à l’Assemblée nationale sur la Nouvelle-Calédonie ont donné lieu à de vifs incidents : au cours des questions au gouvernement, le député RPR de Seine-et-Marne Didier Julia a notamment déclaré qu’avec un projet donnant le pouvoir à une minorité appuyée par des bandes armées, le tout allant à l’encontre de la Constitution, « vous aurez découvert le national-socialisme ». Déclarant que le député lui faisait « pitié », le président de l’Assemblée, Louis Mermaz, a alors suspendu la séance durant une heure. A la reprise, le Premier ministre a réagi avec indignation et fermeté : « vous attaquez la démocratie » a-t-il adressé à l’opposition. Dans le territoire, une vingtaine de Mélanésiens ont été interpellés à Bourail et six placé en garde-à-vue. Le gendarme qui avait été grièvement brûlé dans l’incendie d’un magasin qui s’était produit dans cette commune de l’ouest de l’île est décédé à l’hôpital de Nouméa. Les anti-indépendantistes ont installé des barrages filtrant autour de Bourail.
jeudi 20 décembre
De retour de Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani a été reçu par le président Mitterrand, avant de repartir vers le Pacifique dans la soirée même. Invité du journal télévisé d’Antenne 2, il s’est prononcé pour une indépendance du territoire dans des conditions telles qu’elle apporte à chacun des garanties dont elle a besoin. Une solution qui implique un référendum unique pour tous les Calédoniens, à l’exclusion des fonctionnaires de passage. Toujours à Paris, les sénateurs ont écouté un rapport très dur de la commission de contrôle envoyée dans l’île sous la direction du RPR Yvon Bourges : accusé d’ « attentisme » et de « laxisme caractérisé », le gouvernement « porte la responsabilité du pourrissement de la situation ». Dans la soirée, en menaçant de saisir la Haute Cour de justice, Charles Pasqua a accusé le gouvernement de vouloir imposer l’indépendance malgré la volonté des populations. Sur place, les livreurs des compagnies pétrolières se sont mis en grève, poussant la population à se ruer sur le carburant disponible ; de longues files d’attentat se sont formés aux abords des stations-service. Les syndicats locaux dénoncent l’insécurité qui asphyxie l’économie.
vendredi 21 décembre
Les sept anciens chefs d’Etat et de gouvernement de l’opposition (Giscard d’Estaing, Chirac, Barre, Debré, Chaban-Delmas, Couve de Murville et Messmer) ont publié dans la soirée un communiqué commun, dans lequel ils incriminent les intentions du gouvernement sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Selon eux, les récents propos du président de la République, du Premier ministre et d’Edgard Pisani insistant sur la seule solution de l’indépendance remettent en cause les principes de l’autodétermination, les règles fondamentales de la République et les intérêts de la France. Répondant au délégué du gouvernement, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé, qui vient d’arriver à Paris, se déclare favorable à un référendum qui respecterait les lois de la République et de la Constitution. Il a ajouté que l’ordre n’étant toujours pas rétablie dans l’île, le dialogue reste impossible avec le délégué du gouvernement. Dans le territoire, les syndicats de transporteurs ont levé leur grève et leur compagnie pétrolière ont pu reprendre leurs activités. Une troisième personne est décédée des suites de l’incendie de Bourail, il y a cinq jours.
samedi 22 décembre
Le débat sur la Nouvelle-Calédonie s’envenime en métropole : dans un communiqué, Laurent Fabius accuse l’opposition de jeter de l’huile sur le feu. Selon lui les partis de droite se déconsidèrent en voulant en faire une opération de violente polémique intérieure. Intervenant dans Antenne 2 Midi, l’ancien Premier ministre Michel Debré accuse de son côté le gouvernement de ne pas respecter les lois, même celles qu’il a voté. De retour en Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani prépare la réunion tripartie du 5 janvier. Dans l’île, à 5 h 30 du matin, les gendarmes sont entrés en action à Bourail pour contraindre sans résistance les anti-indépendantistes à lever leurs barrages (ceux-ci auraient été rétablis dans la journée). A Nouméa, le gouvernement local et les syndicats ont lancé un appel au chef du gouvernement pour que l’Etat crée un fonds d’aide exceptionnellement à l’économie calédonienne qui « s’effondre ».
dimanche 23 décembre
Une trêve précaire s’est installée en Nouvelle-Calédonie à l’approche des fêtes de Noël : chacune des deux communautés s’est retirée dans une ambiance malsaine d’auto-défense. Dans la matinée, les gendarmes ont libéré sans incident Armand Guiart, le fils de l’ethnologue Jean Guiart, et sa compagne Charlotte de Damas qui étaient séquestrés depuis trois jours par des anti-indépendantistes qui espéraient obtenir le départ de l’île de l’autre fils Guiart, militant indépendantiste. Sept personnes ont été arrêtées et transférées à Nouméa.
mardi 25 décembre
Menaces indépendantistes en Nouvelle-Calédonie : Jean-Marie Tjibaou a déclaré qu’il maîtrisait encore ses troupes mais que cela pourrait n’avoir qu’un temps.
mercredi 26 décembre
Après la trêve de Noël, le ton remonte en Nouvelle-Calédonie. Déclarant que le territoire doit aujourd’hui se considérer en état de « légitime-défense », le député RPCR Jacques Lafleur réclame l’arrestation du chef indépendantiste Eloi Machoro. Tôt dans la journée, 150 gendarmes mobiles ont dégagé par la force les barrages mis en place par les anti-indépendantistes près de Bourail ; l’assaut a duré près de trois heures et les forces de l’ordre ont du employer des grenades lacrymogènes. L’arrivée sur place de Jacques Lafleur a calmé les esprits ; accompagné d’une importante délégation d’élus, il s’est entretenu à la gendarmerie avec le général commandant les forces dans l’île. L’intervention qu’Edgard Pisani devait faire ce jour devant l’Assemblée territoriale a été reportée.
jeudi 27 décembre
Le délégué du gouvernement pour la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a annoncé pour le 5 janvier un projet « qui surprendra » ses interlocuteurs. Il a déclaré avoir étudié plus de 60 hypothèses pour n’en garder que deux. Il a également dénoncé le refus du RPCR de participer au dialogue tant que l’ordre ne sera pas rétabli totalement.
vendredi 28 décembre
Pour la première fois, Edgard Pisani a rencontré, à huis clos, les élus de l’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie. A sa sortie, le délégué du gouvernement a annoncé plusieurs mesures en faveur d’une reprise économique dans le territoire et déclaré qu’il présentera un document politique le 7 janvier. De son côté, le leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou a fait savoir qu’il n’existait pas de concession possible sur la souveraineté de l’archipel. Il a cependant fait savoir qu’il acceptait, sur la forme, le calendrier de concertation de travail proposé par M. Pisani.
samedi 29 décembre
Déclenchement d'une opération de maintien de l’ordre des gendarmes de Nouvelle-Calédonie contre les barrages installés dans l’île.
dimanche 30 décembre
Les gendarmes ont poursuivi leurs opérations de maintien de l’ordre en Nouvelle-Calédonie : deux barrages indépendantistes ont été démantelés et cinq personnes ont été interpellées à Lifou, dans les îles Loyauté. Sur le plan politique, le président du gouvernement local calédonien Dick Ukeiwé et son collègue de Polynésie française Gaston Flosse, tous deux proches du RPR, ont décidé de jeter les bases d’un front commun de défense des intérêts de ces deux territoires.
lundi 31 décembre
Trois attentats ont été commis dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Nouméa, contre la Poste centrale (explosion dans le local des boîtes postales), dix minutes plus tard contre un magasin d’alimentation du bord de mer et enfin contre une voiture particulière située dans un parking résidentiel : des dégâts matériels importants mais pas de blessé. La gendarmerie poursuit ses opérations ponctuelles dans les zones contrôlées par les indépendantistes : six personnes ont été interpellées.
vers le jeudi 10 janvier
Trois appelés du contingent affectés au 2e RIMA sont morts d’épuisement en Nouvelle-Calédonie durant une marche forcée imposée par leurs officiers.
dimanche 24 février
Début de la seconde Coupe d’Océanie de football (première en 1973), organisée par la Nouvelle-Calédonie : à Nouméa, dans le groupe B, l’Australie a battu la Nouvelle-Calédonie huit buts à zéro. C’était la première fois que ces deux sélections se rencontraient.
mardi 26 février
Second match du premier tour de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a battu les Nouvelles-Hébrides [Vanuatu] quatre buts à trois.
jeudi 28 février
Dernier match du premier tour de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a écrasé la Papouasie-Nouvelle-Guinée huit buts à zéro. Deuxièmes du groupe B, les Calédoniens joueront le match pour la troisième place.
dimanche 2 mars
Match pour la troisième place de la Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, la Nouvelle-Calédonie a battu les Fidji deux buts à un.
lundi 3 mars
Finale de la seconde Coupe d’Océanie de football : à Nouméa, l’Australie a battu Tahiti quatre buts à deux. C’était la première fois que ces deux sélections s’affrontaient. Avec cinq réalisations chacun, les Australiens Ian Hunter et Eddie Krncevic sont les deux meilleurs buteurs de la compétition.
vendredi 20 juin
Devant la situation de crise en cours aux Nouvelles-Hébrides, la France a décidé d’envoyer des renforts, une compagnie de la 11e division de parachutistes, en Nouvelle-Calédonie.
mardi 16 septembre
Le ministère de la Défense a pris des sanctions à l’encontre de quatre officiers du 2e régiment d’infanterie de marine, en poste à Nouméa. Les quatre hommes commandaient une marche forcée au cours de laquelle trois appelés du contingent étaient morts d’épuisement en janvier dernier.
vendredi 12 décembre
Le tribunal permanent des Forces armées de Rennes a condamné deux officiers du 2e RIMA, un capitaine et un lieutenant, à six mois de prison, dont trois avec sursis pour l’affaire de la « marche forcée de Nouméa ». Un sergent-chef a écopé d’une peine de trois mois de prison, dont deux avec sursis, tandis que le quatrième inculpé, un sergent, a été relaxé. Trois appelés du contingent étaient morts d’épuisement en janvier dernier lors d’un exercice très dur dans la brousse de Nouvelle-Calédonie. Les peines infligées sont inférieures à celles requises par le commissaire du gouvernement.
1981
mercredi 8 avril
L’indépendantiste marxiste Nidoïsh Naisseline fonde en Nouvelle-Calédonie le parti Libération kanak socialiste à la suite d’une scission du Parti de libération kanak (Palika) au sein du Front indépendantiste, jugé trop proche du Parti socialiste.
dimanche 10 mai
Second tour de l’élection présidentielle : Valéry Giscard d'Estaing (UDF) recueille 65,5 % dans l'île, mais c'est le socialiste François Mitterrand qui est élu.
dimanche 14 juin
Elections législatives : 40,21 % d'abstentions. UDF-RPR 61,39 %, divers gauche 37,08, MRG 0,12. Elus : un apparenté PS et un apparenté RPR.
vendredi 19 juin
Démission de l’archevêque de Nouméa Mgr Eugène Klein. Agé de 65 ans, il était à la tête de l’archevêché de Nouvelle-Calédonie depuis 1972. Son évêque auxiliaire Mgr Michel Calvet (37 ans) est aussitôt nommé pour lui succéder.
jeudi 23 juillet
Le président Mitterrand a reçu à l’Elysée une délégation de l’Union calédonienne (indépendantistes de Nouvelle-Calédonie).
samedi 19 septembre
Pierre Declercq, secrétaire général de l’Union calédonienne (UC) et partisan de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, a été assassiné à son domicile de Robinson, près de Nouméa. Il avait 43 ans (ses meurtriers ne seront jamais retrouvés). Une importante manifestation de Kanaks est organisée en sa mémoire.
samedi 7 novembre
Une manifestation d’indépendantistes dégénère en émeutes à Nouméa : les vitrines de magasins appartenant à des Européens ont été brisées et des boutiques pillées.
mercredi 11 novembre
Une manifestation anti-indépendantiste a rassemblé 20 000 personnes à Nouméa.
mercredi 9 décembre
Christian Nucci devient haut-commissaire.
lundi 21 décembre
Réforme foncière.
1982
mercredi 20 janvier
Loi permettant au gouvernement de prendre des ordonnances jusqu'au 1er janvier 1983.
en février
Réforme fiscale.
vendredi 18 juin
Les indépendantistes, associés aux centristes, sont majoritaires au sein du nouveau conseil du gouvernement désigné par l’assemblée territoriale.
en juin
Jean-Marie Tjibaou devient vice-président de l’Union calédonienne et vice-président du conseil gouvernemental.
jeudi 22 juillet
En Nouvelle-Calédonie, des militants anti-indépendantistes ont envahi l’Assemblée territoriale, à Nouméa. De violentes bagarres ont éclaté : 17 gendarmes ont été blessés. 13 personnes ont été arrêtées.
dimanche 5 septembre
Jacques Lafleur est réélu député avec 91,95 % des voix.
1983
lundi 10 janvier
2 gendarmes mobiles ont été tués dans une embuscade tendue à La Foa par des Mélanésiens armés de fusils, suite à un conflit entre une société forestière et les tribus locales, à 120 kilomètres au nord-ouest de Nouméa. 6 autres personnes ont été blessées. Les autorités et les partis politiques appellent au calme (on recense 18 morts parmi les forces de l'ordre depuis 10 mois).
mardi 11 janvier
Retour au calme en Nouvelle-Calédonie, avec en parallèle une vaste opération de gendarmerie : 15 Mélanésiens ayant reconnu avoir participé à la fusillade de la veille ont été interpellés. Le haut-commissaire dans l’île, Jacques Roynette, a fait interdire la vente et le port d’armes, y compris les armes blanches, pour une durée indéterminée.
vendredi 14 janvier
Importante manifestation à Nouméa, à l’appel des partis de droite, en hommage aux deux gendarmes tués il y a quatre jours.
samedi 15 janvier
4 000 personnes ont assisté aux obsèques à Nouméa des deux gendarmes tués le 10 janvier.
mercredi 11 mai
Regain de tension en Nouvelle-Calédonie : un jeune Kanak a été tué d’un coup de fusil par un ancien employé d’origine européenne d’une société du nickel.
vendredi 13 mai
Plusieurs manifestations d’indépendantistes se déroulent dans l’île depuis trois jours.
samedi 14 mai
Nouvelle manifestation indépendantiste, dans le calme, en Nouvelle-Calédonie.
mercredi 18 mai
Manifestations sans précédent en Nouvelle-Calédonie : à l’occasion de l’arrivée à Nouméa du secrétaire d’Etat aux DOM-TOM, Georges Lemoine, environ 8 000 indépendantistes kanaks et 30 000 anti-indépendantistes ont défilé dans les rues de Nouméa, chacun de leur côté, sans incident notable.
vendredi 20 mai
Fin de la visite en Nouvelle-Calédonie du secrétaire d’Etat Georges Lemoine. Il est parvenu à ménager à la fois les indépendantistes et leurs opposants : il n’exclut pas l’indépendance du territoire mais pour y arriver il faudra un consensus de la population…
vendredi 8 juillet
Ouverture prés de Paris de la Table ronde de Nainville-les-Roches (Essonne) entre le Front indépendantiste de Nouvelle-Calédonie, emmené par Jean-Marie Tjibaou, le RPCR anti-indépendantiste de Jacques Lafleur et le gouvernement français représentant par le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer Georges Lemoine.
mardi 12 juillet
Clôture de la Table ronde de Nainville-les-Roches : le secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer reconnaît aux Kanaks leur « droit inné et actif à l’indépendance ».
vendredi 23 septembre
Violences en Nouvelle-Calédonie entre Kanaks et les populations d’origine européenne.
en septembre
Création de la compagnie Air Calin (Air Calédonie International).
vendredi 2 décembre
Air Calin commence ses activités avec un Boeing 747 entre Melbourne et Nouméa en association avec Qantas : « Caledonian Express ».
vendredi 23 décembre
L’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie rejette un avant-projet de statut d'autonomie.
1984
lundi 16 avril
Création en Nouvelle-Calédonie de la fédération locale du Front national, dirigée par le Kanak François Néoeré.
jeudi 3 mai
Un projet de loi sur un nouveau statut d’autonomie interne pour la Nouvelle-Calédonie a été adopté en Conseil des ministres. Un scrutin d’autodétermination pour la population locale est prévu d’ici cinq ans.
mardi 31 juillet
Vote par l’Assemblée nationale du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, préparé par le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer Georges Lemoine.
jeudi 6 septembre
Entrée en vigueur du « Statut Lemoine » qui renforce fortement l’autonomie de la Nouvelle-Calédonie et prévoit l’organisation d’un référendum sur l’avenir institutionnel de l'archipel (indépendance ou non) dans les 5 ans. Les institutions précédentes (gouvernement local et Assemblée territoriale), sont maintenues avec des prérogatives augmentées. Création de 6 circonscriptions sur la base des aires coutumières, avec chacune une assemblée de pays consultative composée de 24 représentants de la coutume et de 24 représentants des communes.
du samedi 22 au lundi 24 septembre
Le Front indépendant est reconstitué en Front de libération nationale Kanak et socialiste (FLNKS), rassemblant l'UC, le FULK, l'UPM, le PSK et le Palika. Ce nouveau mouvement, toujours conduit par Jean-Marie Tjibaou, rejette le statut Lemoine, exige un référendum où seuls les Kanaks auront le droit de participer et appelle au boycott des élections et des institutions.
en octobre
Barrages routiers, violences.
dimanche 18 novembre
Elections territoriales en Nouvelle-Calédonie, marquées par la violence et les barricades du FLNKS : 49,87 % d'abstentions (le FLNKS a appelé au boycott). Le RPCR, proche du RPR, arrive largement en tête avec 70,87 % des suffrages (34 sièges, + 19), LKS 7,33 % (6 s.), FN 6,05 % (1 s.), Fédération pour une nouvelle société calédonienne 4,44 % (1 s., - 6), Front indépendantiste 0 % (0 s., - 14). Des militants indépendantistes ont été arrêtés après avoir tenté de s’opposer à l’organisation du scrutin. Eloi Machoro, secrétaire général de l’Union calédonienne, a brisé une urne à Canala à coup de tamiok (hache de guerre traditionnelle).
nuit du lundi 19 au mardi 20 novembre
Deux gendarmeries ont été occupées par des indépendantistes kanaks, qui réclament la libération de leurs camarades arrêtés. Des armes ont été prises avant d’être restituées aux forces de l’ordre.
mardi 20 novembre
En Nouvelle-Calédonie, deux cents militants FLNKS, menés par Eloi Machoro, occupent la mairie de Thio. Les propriétaires caldoches sont désarmés. D’autres incidents se produisent à Ponérihouen et Ouvéa. Le haut-commissaire en Nouvelle-Calédonie a lancé un appel au calme.
jeudi 22 novembre
La tension s’accroît en Nouvelle-Calédonie : pris à partie par des indépendantistes, quatre CRS ont été blessés par balles. Les kanaks maintiennent leurs barrages aux alentours de Nouméa et sabotent des lignes à haute tension (les 15 000 habitants du Mont Dore, près de Nouméa, ont été privés d’électricité pendant plusieurs heures). Par ailleurs, le sous-préfet des îles Loyauté a été fait prisonnier dans l’île de Lifou : ses geôliers, membres du FLNKS, réclament notamment l’annulation des élections territoriales
vendredi 23 novembre
Renforcement du maintien de l’ordre en Nouvelle-Calédonie : trois escadrons de gendarmerie mobile sont envoyés en renforts dans l’île et des blindés militaires patrouillent dans les rues de Nouméa. Le haut-commissaire a interdit les manifestations.
samedi 24 novembre
Les incidents se multiplient en Nouvelle-Calédonie : bâtiments incendiés dans le nord de l’île, gendarmeries occupées dans l’est par des membres du FLNKS. Les moyens de communications restent bloqués par la présence des nombreux barrages depuis une semaine.
dimanche 25 novembre
Les indépendantistes kanaks ont formé un gouvernement provisoire. Cinq anciens Premier ministres gaullistes (Chaban-Delmas, Chirac, Couve de Murville, Debré et Messmer) ont lancé ensemble un appel solennel au président Mitterrand pour que soient respectés les institutions et le processus démocratique dans l’île ; ils s’opposent à ce que le gouvernement accélère le processus d’indépendance du territoire. Toute la journée, à l’occasion de la discussion du budget des DOM-TOM (dont le vote a été repoussé), les sénateurs RPR, en particulier Charles Pasqua et Yvon Bourges, ont durement pris à partie le secrétaire d’Etat Georges Lemoine. Ce dernier a rappelé que le but du gouvernement était de trouver une solution avec tous les gens sérieux. Invité du Club de la presse d’Europe 1, le ministre de l’Intérieur Pierre Joxe a déclaré que le dialogue était indispensable.
mardi 27 novembre
Arrivée en Nouvelle-Calédonie de l’émissaire spécial du gouvernement, Charles Barbeau. En métropole, la polémique se poursuit sur l’attitude à suivre dans cette affaire : présidents des groupes RPR et UDF à l’Assemblée nationale, Claude Labbé et Jean-Claude Gaudin, ont écrit au Premier ministre pour demander l’organisation d’un débat sur la situation dans ce territoire d’outre-mer. Tout en réclamant le retour à l’ordre, Jacques Chirac s’est dit prêt à soutenir l’action du gouvernement dans l’île si celui-ci respecte les principes démocratiques et républicains. Le groupe communiste à l’Assemblée s’est déclaré favorable à un référendum d’autodétermination anticipé.
jeudi 29 novembre
Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, un fermier européen de 70 ans a été roué de coup par une quinzaine de Kanaks et laissé pour mort tandis que son épouse a été blessée par balle lors de leur fuite en voiture de leur maison située en pleine brousse. Dès la matinée, la gendarmerie de la région avait été occupée par le FLNKS. Par ailleurs, le sous-préfet des îles Loyauté a été libéré dans l’île de Lifou. En France, les leaders de l’opposition réclament le rétablissement dans la région de l’ordre républicain, qui doit passer avant les discussions avec les indépendantistes.
nuit du jeudi 29 au vendredi 30 novembre
Premier décès de la crise qui secoue la Nouvelle-Calédonie depuis quinze jours : un Européen de 56 ans a été tué au cours d’une fusillade entre communautés dans le nord de l’île, à Ouégoa. Les premiers tirs sont partis alors que des Kanaks refusaient d’ouvrir un passage dans l’un de leurs barrages pour laisser passer le convoi qui transférait vers un l’homme âgé blessé quelques heures plus tôt. Les Mélanésiens affirment également que l’un des leurs a trouvé la mort. Six autres personnes ont été blessées. Des commandos de gendarmerie héliportés sur les lieux ont procédé à l’arrestation de quatre Kanaks.
vendredi 30 novembre
Les menaces et les violences de ces dernières 24 heures ont conduit les autorités de Nouvelle-Calédonie à accélérer l’évacuation des familles européennes habitant dans la brousse ou dans certains villages du nord de l’île : femmes, enfants et personnes âgées sont transportées par voie aérienne vers Nouméa. Des maisons sont brûlées et du bétail abattu. Dans la soirée, les indépendantistes ont officiellement mis en place un gouvernement provisoire, avec pour président Jean-Marie Tjibaou. Selon la rumeur, une cinquantaine de mercenaires français et allemands auraient été recrutés pour assurer la protection des caldoches et empêcher « le communisme de mettre la main sur l’île ». Tandis que l’émissaire du gouvernement, Charles Barbeau, quittait l’île pour rendre compte à Paris de sa mission, trois nouvelles compagnies de CRS sont arrivées dans le territoire afin de renforcer le dispositif de gendarmerie. En France, le président du groupe RPR à l’Assemblée nationale, Claude Labbé, affirme que dans cette affaire le gouvernement « a pris la voie du racisme et de l’apartheid tels qu’ils existent en Afrique du Sud ».
samedi 1er décembre
Réuni de façon exceptionnelle, le Conseil des ministres a nommé un délégué pour la Nouvelle-Calédonie, l’ancien ministre (1961-1967) Edgard Pisani, actuel commissaire aux Communautés européennes chargé du développement. Placé sous l’autorité directe du Premier ministre, il exercera également les attributions de haut-commissaire Sa tâche sera en premier lieu de maintenir l’ordre dans l’île tout en continuant le dialogue avec toutes les parties pour parvenir à l’autodétermination, dans le respect des droits de chaque communauté. Dans un délai de deux mois, il devra « proposer au gouvernement, puis de mettre en œuvre, les mesures concernant l’évolution institutionnelle et le développement économique, social et culturel de la Nouvelle-Calédonie ». Le président du gouvernement du territoire, Dick Ukeiwé, proche du RPR, est arrivé à Paris où il s’est entretenu en fin de journée avec le président Mitterrand. Sur le terrain, Nouméa a été décrété « ville morte » par la communauté européenne. Plus au nord, Jean-Marie Tjibaou a proclamé la naissance de la République de Kanakie, constituée d’un contre-gouvernement indépendantiste dont Eloi Machoro est le ministre de la Sécurité. La première levée du « drapeau kanakie » est organisée dans la tribu de La Conception, au Mont-Dore, dans la banlieue de Nouméa. Par ailleurs, deux personnes ont été blessées dans chaque camp à Poya.
dimanche 2 décembre
Laurent Fabius s’est entretenu dans la matinée avec Edgard Pisani. Ce dernier s’est ensuite envolé vers la Nouvelle-Calédonie. Dans l’île, les gendarmes envoyés en renfort pour protéger les Européens de Thio, dans l’est de l’île, ont du reculer et une soixantaine de leurs collègues sont toujours encerclés dans la gendarmerie. Le village est assiégé depuis 15 jours par des militants kanaks.
lundi 3 décembre
Des gendarmes restent bloqués à Thio, dans l’est de l’île, tandis que deux personnes, un chef d’escale d’UTA et un journaliste local, ont été blessées par balles près de Nouméa. A Paris, Dick Ukeiwé a été reçu à Matignon par le Premier ministre. A sa sortie, le président du gouvernement du territoire a accusé les indépendantistes d’y faire régner la terreur, notamment par le biais de « tribunaux révolutionnaires ».
mardi 4 décembre
Arrivée à Nouméa du délégué et haut-commissaire pour la Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani, qui a aussitôt entamé ses consultations. Avant de rejoindre la table des négociations, le FLNKS exige toujours la libération de 15 de ses militants emprisonnés. Une délégation de la commission de contrôle du Sénat, présidée par le RPR Yvon Bourges, est arrivée à son tour quelques heures plus tard dans le territoire. L’évacuation des familles caldoches commencent dans les zones contrôlées par le FLNKS (certains restent sur place bien décidées à se défendre par leurs propres moyens). A Paris, pour la deuxième fois en huit jours, Laurent Fabius a prononcé à l’Assemblée nationale, sur un ton apaisant mais ferme, une déclaration sur la situation dans l’île. L’intervention du Premier ministre, qui a lancé un appel à la trêve politicienne, a été suivie d’un débat, en présence de Dick Ukeiwé. Un consensus est apparu sur le principe d’autodétermination du territoire, mais pas sur son processus. Le socialiste Lionel Jospin a proposé deux référendums séparés pour les deux communautés de Nouvelle-Calédonie ainsi qu’une « indépendance pluriethnique » ; des propositions qualifiées de « magouille électorale dont le PS a le secret » pour Jean-Claude Gaudin ou décision anticonstitutionnelle instaurant « une sorte d’apartheid » selon le RPR Jacques Toubon. Le Parti communiste a mis en garde contre « l’engrenage colonial ».
mercredi 5 décembre
Intervenant à la télévision locale, le délégué du gouvernement en Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a lancé un appel à l’ordre à la population comme préalable à toute discussion. Il a également annoncé le calendrier de son action, sa mission devant être achevée dans deux mois. Dick Ukeiwé a quitté Paris dans la soirée pour rejoindre Nouméa.
nuit du mercredi 5 au jeudi 6 décembre
Une fusillade entre Kanaks et Européens s’est produite à Hienghène, sur la côte est de la Nouvelle-Calédonie : neuf personnes ont été tuées et trois autres grièvement blessées (dont un mortellement). Les victimes sont toutes des Mélanésiens de la tribu Tiendanite et parmi les morts figurent deux frères de Jean-Marie Tjibaou. Les indépendantistes disent être tombés dans une embuscade tendue par huit hommes tandis que leurs adversaires évoquent l’auto-défense…
jeudi 6 décembre
En signe d’apaisement après le drame de la nuit dernière, Edgard Pisani a annoncé la mise en liberté de 17 militants du FLNKS détenus à Nouméa. Répondant à l’appel du délégué du gouvernement, les indépendantistes kanaks ont libéré tous leurs otages et commencé à lever la totalité de leurs barrages dans l’île et le siège des gendarmeries et mairies.
samedi 8 décembre
Le Haut-Commissariat en Nouvelle-Calédonie affirme que la libre circulation est rétablie à peu près partout dans le territoire. A l’exception de Thio, les barrages des indépendantistes sont presque tous levés. Edgard Pisani s’est longuement entretenu dans la journée avec le président du gouvernement local Dick Ukeiwé. Dans l’est de l’île, les funérailles des 10 Kanaks tués il y a quatre jours se sont déroulées à Hienghène.
dimanche 9 décembre
La première rencontre officielle entre les dirigeants du FLNKS et le délégué du gouvernement Edgard Pisani s’est déroulée dans la soirée.
lundi 10 décembre
Arrestation et inculpation en Nouvelle-Calédonie d’un Métis qui a participé à la fusillade de Hienghène. Les derniers barrages qui interdisaient encore l’accès à Thio, village assiégé depuis trois semaines, ont été levés, mais Eloi Machoro assure que ses hommes restent mobilisés et que les fusils sont à portée de main.
mardi 11 décembre
Tenant une conférence de presse, les responsables du FLNKS ont réaffirmé souhaiter une indépendance kanake, ce qui exclut tout partage de la Nouvelle-Calédonie. Envoyé de Jacques Chirac, Bernard Pons est arrivé dans l’île pour vérifier si les déclarations du Premier ministre étaient suivies d’effet : le député RPR affirme que l’ordre public n’est pas encore rétabli. Par ailleurs, six personnes impliquées dans le massacre de Hienghène, cinq Métis et un Mélanésien, se sont rendues au juge d’instruction dans l’ouest du territoire.
mercredi 12 décembre
La situation en Nouvelle-Calédonie est au cœur des débats à l’Assemblée nationale : lors des questions d’actualité, le RPR a interpellé le gouvernement sur ce sujet, l’accusant d’avoir déjà choisi sa solution au problème, c’est-à-dire l’indépendance. De son côté, Edgard Pisani poursuit ses consultations dans l’île, où le calme est totalement revenu. Les discussions préparatoires étant achevées, le délégué du gouvernement estime que le véritable dialogue peut maintenant commencer. Afin de préciser les positions de chacun, il a rédigé deux questionnaires qui s’adressent aux indépendantistes et à leurs adversaires.
vendredi 14 décembre
Le président du gouvernement local, Dick Ukeiwé, a fait savoir qu’il refusait de participer aux consultations générales, mises en place à partir du 15 décembre avec tous les mouvements politiques de Nouvelle-Calédonie, parce que l’ordre n’est pas entièrement rétabli. Pour Edgard Pisani, il s’agit d’un faux-fuyant car le RPCR refuse en fait toute négociation.
samedi 15 décembre
Début en Nouvelle-Calédonie des consultations d’Edgard Pisani avec les différentes forces politiques du territoire : le délégué du gouvernement a d’abord rencontré une délégation conduite par le député RPCR Jacques Lafleur avant de s’entretenir pendant près de deux heures avec le leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou. Au même moment, les barrages faisaient leur réapparition dans l’île à la suite de l’arrestation et l’inculpation de dix Mélanésiens impliqués dans des vols.
nuit du samedi 15 au dimanche 16 décembre
Deux avions d’Air Calédonie ainsi que le bimoteur d’Edgard Pisani ont été gravement endommagés par des inconnus sur l’aéroport de Nouméa. Les appareils, percutés par des camionnettes, ne pourront pas voler avant plusieurs semaines, voir plusieurs mois. Le trafic aérien local est suspendu jusqu’à la vérification de tous les autres avions.
dimanche 16 décembre
Edgard Pisani a reçu trois délégations d’indépendantistes modérés. Trois barrages ont été levés sans incident sur la côte orientale de Nouvelle-Calédonie. Interrogé à la télévision française sur la question calédonienne, le président Mitterrand croit que ce territoire est « appelé à l’émancipation sous une forme d’autonomie ou d’indépendance qu’il doit définir lui-même ».
lundi 17 décembre
Ayant achevé ses consultations en Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani s’apprête à rentrer à Paris. Sur la côte ouest de l’île, à Bourail, un incendie, probablement d’origine criminelle, a grièvement blessé six personnes (trois succomberont à leur blessure). Dans la même localité, un coup de feu a tiré contre une ambulance : deux personnes ont été légèrement blessées.
mardi 18 décembre
Dans une allocution radiotélévisée, le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie a appelé les habitants du territoire à tenir bon et à faire preuve d’esprit de résistance. De son côté, le FLNKS dénonce dans un communiqué « la campagne de calomnie et de désinformation » orchestrée ces derniers jours par le RPCR. Au lendemain du tir contre une ambulance à Bourail, des médecins et représentants des professions paramédicales ont manifesté à Nouméa. En métropole, le RPR poursuit la polémique sur le rôle des gendarmes : Claude Labbé, président du groupe à l’Assemblée nationale, a déclaré que le gouvernement a empêché les forces de l’ordre de faire leur travail dans l’île. Par ailleurs, l’Australie a formellement protesté contre les récentes critiques, jugées « offensantes » et « déplacées », du président Mitterrand contre la position du gouvernement de Canberra sur la Nouvelle-Calédonie.
mercredi 19 décembre
Les débats à l’Assemblée nationale sur la Nouvelle-Calédonie ont donné lieu à de vifs incidents : au cours des questions au gouvernement, le député RPR de Seine-et-Marne Didier Julia a notamment déclaré qu’avec un projet donnant le pouvoir à une minorité appuyée par des bandes armées, le tout allant à l’encontre de la Constitution, « vous aurez découvert le national-socialisme ». Déclarant que le député lui faisait « pitié », le président de l’Assemblée, Louis Mermaz, a alors suspendu la séance durant une heure. A la reprise, le Premier ministre a réagi avec indignation et fermeté : « vous attaquez la démocratie » a-t-il adressé à l’opposition. Dans le territoire, une vingtaine de Mélanésiens ont été interpellés à Bourail et six placé en garde-à-vue. Le gendarme qui avait été grièvement brûlé dans l’incendie d’un magasin qui s’était produit dans cette commune de l’ouest de l’île est décédé à l’hôpital de Nouméa. Les anti-indépendantistes ont installé des barrages filtrant autour de Bourail.
jeudi 20 décembre
De retour de Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani a été reçu par le président Mitterrand, avant de repartir vers le Pacifique dans la soirée même. Invité du journal télévisé d’Antenne 2, il s’est prononcé pour une indépendance du territoire dans des conditions telles qu’elle apporte à chacun des garanties dont elle a besoin. Une solution qui implique un référendum unique pour tous les Calédoniens, à l’exclusion des fonctionnaires de passage. Toujours à Paris, les sénateurs ont écouté un rapport très dur de la commission de contrôle envoyée dans l’île sous la direction du RPR Yvon Bourges : accusé d’ « attentisme » et de « laxisme caractérisé », le gouvernement « porte la responsabilité du pourrissement de la situation ». Dans la soirée, en menaçant de saisir la Haute Cour de justice, Charles Pasqua a accusé le gouvernement de vouloir imposer l’indépendance malgré la volonté des populations. Sur place, les livreurs des compagnies pétrolières se sont mis en grève, poussant la population à se ruer sur le carburant disponible ; de longues files d’attentat se sont formés aux abords des stations-service. Les syndicats locaux dénoncent l’insécurité qui asphyxie l’économie.
vendredi 21 décembre
Les sept anciens chefs d’Etat et de gouvernement de l’opposition (Giscard d’Estaing, Chirac, Barre, Debré, Chaban-Delmas, Couve de Murville et Messmer) ont publié dans la soirée un communiqué commun, dans lequel ils incriminent les intentions du gouvernement sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Selon eux, les récents propos du président de la République, du Premier ministre et d’Edgard Pisani insistant sur la seule solution de l’indépendance remettent en cause les principes de l’autodétermination, les règles fondamentales de la République et les intérêts de la France. Répondant au délégué du gouvernement, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé, qui vient d’arriver à Paris, se déclare favorable à un référendum qui respecterait les lois de la République et de la Constitution. Il a ajouté que l’ordre n’étant toujours pas rétablie dans l’île, le dialogue reste impossible avec le délégué du gouvernement. Dans le territoire, les syndicats de transporteurs ont levé leur grève et leur compagnie pétrolière ont pu reprendre leurs activités. Une troisième personne est décédée des suites de l’incendie de Bourail, il y a cinq jours.
samedi 22 décembre
Le débat sur la Nouvelle-Calédonie s’envenime en métropole : dans un communiqué, Laurent Fabius accuse l’opposition de jeter de l’huile sur le feu. Selon lui les partis de droite se déconsidèrent en voulant en faire une opération de violente polémique intérieure. Intervenant dans Antenne 2 Midi, l’ancien Premier ministre Michel Debré accuse de son côté le gouvernement de ne pas respecter les lois, même celles qu’il a voté. De retour en Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani prépare la réunion tripartie du 5 janvier. Dans l’île, à 5 h 30 du matin, les gendarmes sont entrés en action à Bourail pour contraindre sans résistance les anti-indépendantistes à lever leurs barrages (ceux-ci auraient été rétablis dans la journée). A Nouméa, le gouvernement local et les syndicats ont lancé un appel au chef du gouvernement pour que l’Etat crée un fonds d’aide exceptionnellement à l’économie calédonienne qui « s’effondre ».
dimanche 23 décembre
Une trêve précaire s’est installée en Nouvelle-Calédonie à l’approche des fêtes de Noël : chacune des deux communautés s’est retirée dans une ambiance malsaine d’auto-défense. Dans la matinée, les gendarmes ont libéré sans incident Armand Guiart, le fils de l’ethnologue Jean Guiart, et sa compagne Charlotte de Damas qui étaient séquestrés depuis trois jours par des anti-indépendantistes qui espéraient obtenir le départ de l’île de l’autre fils Guiart, militant indépendantiste. Sept personnes ont été arrêtées et transférées à Nouméa.
mardi 25 décembre
Menaces indépendantistes en Nouvelle-Calédonie : Jean-Marie Tjibaou a déclaré qu’il maîtrisait encore ses troupes mais que cela pourrait n’avoir qu’un temps.
mercredi 26 décembre
Après la trêve de Noël, le ton remonte en Nouvelle-Calédonie. Déclarant que le territoire doit aujourd’hui se considérer en état de « légitime-défense », le député RPCR Jacques Lafleur réclame l’arrestation du chef indépendantiste Eloi Machoro. Tôt dans la journée, 150 gendarmes mobiles ont dégagé par la force les barrages mis en place par les anti-indépendantistes près de Bourail ; l’assaut a duré près de trois heures et les forces de l’ordre ont du employer des grenades lacrymogènes. L’arrivée sur place de Jacques Lafleur a calmé les esprits ; accompagné d’une importante délégation d’élus, il s’est entretenu à la gendarmerie avec le général commandant les forces dans l’île. L’intervention qu’Edgard Pisani devait faire ce jour devant l’Assemblée territoriale a été reportée.
jeudi 27 décembre
Le délégué du gouvernement pour la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a annoncé pour le 5 janvier un projet « qui surprendra » ses interlocuteurs. Il a déclaré avoir étudié plus de 60 hypothèses pour n’en garder que deux. Il a également dénoncé le refus du RPCR de participer au dialogue tant que l’ordre ne sera pas rétabli totalement.
vendredi 28 décembre
Pour la première fois, Edgard Pisani a rencontré, à huis clos, les élus de l’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie. A sa sortie, le délégué du gouvernement a annoncé plusieurs mesures en faveur d’une reprise économique dans le territoire et déclaré qu’il présentera un document politique le 7 janvier. De son côté, le leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou a fait savoir qu’il n’existait pas de concession possible sur la souveraineté de l’archipel. Il a cependant fait savoir qu’il acceptait, sur la forme, le calendrier de concertation de travail proposé par M. Pisani.
samedi 29 décembre
Déclenchement d'une opération de maintien de l’ordre des gendarmes de Nouvelle-Calédonie contre les barrages installés dans l’île.
dimanche 30 décembre
Les gendarmes ont poursuivi leurs opérations de maintien de l’ordre en Nouvelle-Calédonie : deux barrages indépendantistes ont été démantelés et cinq personnes ont été interpellées à Lifou, dans les îles Loyauté. Sur le plan politique, le président du gouvernement local calédonien Dick Ukeiwé et son collègue de Polynésie française Gaston Flosse, tous deux proches du RPR, ont décidé de jeter les bases d’un front commun de défense des intérêts de ces deux territoires.
lundi 31 décembre
Trois attentats ont été commis dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Nouméa, contre la Poste centrale (explosion dans le local des boîtes postales), dix minutes plus tard contre un magasin d’alimentation du bord de mer et enfin contre une voiture particulière située dans un parking résidentiel : des dégâts matériels importants mais pas de blessé. La gendarmerie poursuit ses opérations ponctuelles dans les zones contrôlées par les indépendantistes : six personnes ont été interpellées.