nuit du lundi 31 décembre au mardi 1er janvier
Trois attentats ont été commis dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Nouméa, contre la Poste centrale (explosion dans le local des boîtes postales), dix plus tard contre un magasin d’alimentation du bord de mer et enfin contre une voiture particulière située dans un parking résidentiel : des dégâts matériels importants mais pas de blessé.
mardi 1er janvier
Une personne a été tuée à Nouméa.
mercredi 2 janvier
Le président du gouvernement calédonien Dick Ukeiwé a condamné les attentats de la nuit de la Saint-Sylvestre.
samedi 5 janvier
Dans une interview accordée au journal le Monde, le député RPCR de Nouvelle-Calédonie Jacques Lafleur déclare que l’indépendance du territoire serait une « stupidité ».
dimanche 6 janvier
Si le calme demeure, la tension est remontée d’un cran en Nouvelle-Calédonie à la veille de la présentation du plan d’Edgard Pisani pour l’avenir du territoire. Certaines tribus ont remonté des barrages par crainte des réactions des anti-indépendantistes à l’annonce des mesures. A Nouméa, un comité de crise a été formé pour apporter son soutien au gouvernement légal de l’île.
lundi 7 janvier
Le délégué du gouvernement Edgard Pisani a dévoilé son plan pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Le point le plus important concerne un référendum organisé au mois de juillet qui donnera le choix entre le maintien dans la République française ou la création d’un Etat indépendant associé à la France. Le droit de vote pour y participer nécessiterait une présence d’au moins trois ans sur le territoire. Un statut spécial serait réservé à Nouméa. Le FLNKS déclare sa satisfaction de voir ramener de 1989 à 1985 une telle consultation. De son côté, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé et son parti, le RPCR, disent toujours non à l’indépendance et oui au statut Lemoine.
jeudi 10 janvier
Edgard Pisani a commencé ses consultations auprès des forces politiques de Nouvelle-Calédonie. Après avoir d’abord bien accueilli le plan du délégué du gouvernement, les indépendantistes contestent maintenant la composition du corps électoral appelé à se prononcer lors du référendum de juillet. Nidoish Naisseline, responsable du parti Libération kanak socialiste (LKS) et grand chef de la tribu de Guahma, a notamment fait connaître son insatisfaction. Les représentants de la communauté wallisienne, estimée à 15 000 personnes, se sont alignés en conférence de presse sur la ligne anti-indépendantiste du RPCR.
vendredi 11 janvier
Un jeune Caldoche de 17 ans, Yves Tual, a été tué par des militants indépendantistes sur la propriété de ses parents située au col de Nassirah, près de Thio, dont le maire est l’oncle de la victime ainsi que le seul élu du Front national au Parlement territorial. Le jeune homme effectuait une ronde pour protéger le bétail familial avec son père, qui a tiré au-dessus d’un buisson. Des hommes cachés dans les fourrées ont alors répliqué.
nuit du vendredi 11 au samedi 12 janvier
Le décès d’Yves Tual a entraîné de violentes émeutes anti-indépendantistes à Nouméa. Des commerces appartenant à des personnalités indépendantistes ont été pris d’assaut, incendiés ou pillés : la pharmacie générale (propriété de Maurice Lenormand), la station service d’André Dang, etc. Le siège du FLNKS, menacé, a été protégé par un grand nombre de ses militants. Des manifestants loyalistes ont convergé vers le Haut-commissariat, où de violents affrontements se sont produits avec les forces de l’ordre : tirs de grenade lacrymogène ont répondu aux lancers de cocktails Molotov. Le bilan des violences se chiffre à 48 blessés et 51 arrestations. Ailleurs dans l’île la villa de Jean Guyart, ethnologue favorable à l’indépendance, a été incendiée.
samedi 12 janvier
La crise s’aggrave en Nouvelle-Calédonie : le leader radical Eloi Machoro, « ministre de la Sécurité » du gouvernement provisoire de Tjibaou, a été tué d’une balle dans la poitrine par un membre du GIGN au cours d’une opération des gendarmes contre une ferme La Foa, où les indépendantistes retenaient prisonnier le propriétaire européen. Machoro avait 39 ans. Un autre militant indépendantiste, Marcel Nonnaro, a été tué par un autre gendarme. Les deux auteurs des tirs sont aussitôt exfiltrés de l’île. Tout au long de la journée, des manifestants anti-indépendantistes s’en sont violemment pris aux forces de l’ordre à Nouméa, faisant une cinquantaine de blessés de part et d’autre. Une station-service appartenant à Vietnamien soupçonné d’être proche du FLNKS a été incendié. Réunis en centre-ville, un millier de personnes ont bruyamment applaudi lorsque le maire Roger Laroque a annoncé la mort d’Eloi Machoro, une annonce qui a détenu l’atmosphère envers les gardes-mobile présents. Invoquant l’article 119 de la loi du 6 septembre 1984, Edgard Pisani a proclamé l’état d’urgence et le couvre-feu dans l’ensemble du territoire. Intervenant à la télévision, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé a lancé un appel solennel au retour au calme. Jean-Marie Tjibaou a de son côté déclaré rejeter en bloc toutes les propositions du délégué du gouvernement en raison de « l’assassinat d’Eloi Machoro ». Tout en réaffirmant que celles-ci étaient « raisonnables », le Premier ministre Laurent Fabius a annoncé l’envoi de mille hommes en renfort pour assurer l’ordre en Nouvelle-Calédonie (ce qui portera sur place les effectifs de CRS et de gardes-mobile à 3 280, sans compter les 3 000 militaires stationnées dans l’île). A Paris, le sénateur RPR Charles Pasqua demande qu’Edgar Pisani soit relevé de ses fonctions et Jean-Marie Le Pen réclame que le Premier ministre se rende en Nouvelle-Calédonie pour prendre la responsabilité des opérations.
nuit du samedi 12 au dimanche 13 janvier
En dehors des titulaires d’un laissez-passer officiel, plus personne ne circule dans les rues de Nouméa après 19 heures.
dimanche 13 janvier
Les obsèques du jeune caldoche Yves Thual, tué par des indépendantistes il y a deux jours, se sont tenues dans une ambiance tendue, mais dans le calme. Le président du gouvernement local, les maires de Thio (oncle de la victime) et de Nouméa ont assisté à la cérémonie. Dick Ukeiwé s’est ensuite adressé une nouvelle fois à la population pour lui demander de ne plus manifester et de respecter l’état d’urgence. Une polémique a éclaté sur les circonstances de la mort d’Eloi Machoro. Sa famille conteste le rapport balistique et les circonstances dans lesquelles il a été tué. Edgard Pisani affirme qu’il n’y a jamais d’ordre de « tirer pour tuer ». Le FLNKS a annoncé trois jours de deuil et un syndicat indépendantiste a appelé à la grève pour les 14 et 15 janvier.
Le président du groupe communiste à l’Assemblée nationale André Lajoinie était l’invité du Club de la presse d’Europe 1. Il a notamment exprimé ses doutes sur la version officielle concernant la mort du leader indépendantiste calédonien Eloi Machoro. S’exprimant devant les jeunes giscardiens, l’ancien président Giscard d’Estaing a pour sa part accusé le gouvernement d’avoir commis plusieurs fautes graves dans l’affaire calédonienne.
nuit du dimanche 13 au lundi 14 janvier
Pour la deuxième nuit consécutive, le couvre-feu a été respecté en Nouvelle-Calédonie.
lundi 14 janvier
En application de la loi du 3 avril 1955, le Premier ministre confère par décret au Haut-Commissaire de la République Edgard Pisani les pouvoirs extraordinaires qu’il pourra exercer au cours de toute la durée de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie. La population kanake a rendu un dernier hommage à Eloi Machoro et à Marcel Nonnaro dont les obsèques ont été célébrées ce jour. Les dépouilles ont quitté en convoi la morgue de Nouméa pour être inhumées sur les terres de leur tribu Gélima, près de Thio. Le FNLKS accuse toujours les forces de l’ordre d’avoir assassiné les deux hommes sur un ordre venu de très haut. Les indépendantistes se déclarent cependant toujours ouverts à la discussion. Dans le port de Thio, trois thoniers ont été détruits par des bombes. A Paris, quelques centaines de partisans de l’indépendance du territoire (anarchistes, libertaires, communistes, etc.) ont manifesté sans incident du Panthéon à l’hôtel Matignon, tandis qu’une messe a été organisée en l’église Saint-Augustin à la mémoire d’Yves Thual, à la demande du Front national (Jean-Marie Le Pen était présent au premier rang).
mardi 15 janvier
Le ton continue à monter en Nouvelle-Calédonie côté indépendantiste : le chef du FLNKS Jean-Marie Tjibaou accuse directement Edgard Pisani d’avoir donné son accord au « meurtre » d’Eloi Machoro. Les indépendantistes accusent également les extrémistes caldoches d’avoir attaqué le 13 janvier la morgue de Nouméa où reposait le corps de M. Machoro, une attaque qui aurait été repoussé par les militants kanaks. Sur le terrain, l’état d’urgence, respecté, a été assoupli. Un diplomate américain a effectué une visite dans l’île. Washington craint que le mouvement kanak n’entraîne une déstabilisation du Pacifique Sud. A Paris, le RPR a annoncé qu’il rejetait désormais le plan Pisani de façon catégorique et définitive.
mercredi 16 janvier
Intervention dans la soirée du président Mitterrand sur Antenne 2. Concernant le dossier brûlant de la Nouvelle-Calédonie, il a annoncé qu’il partirait demain à destination du territoire français pour une brève visite.
jeudi 17 janvier
Le président Mitterrand a quitté la France dans la soirée à destination de la Nouvelle-Calédonie. Sur place, dans l’attente de l’arrivée du chef de l’Etat, des mesures de sécurité exceptionnelles ont commencé à être prises : 5 000 militaires sont mobilisés, tous les véhicules entrant dans Nouméa sont fouillés et le navire-école Jeanne-d’Arc, qui aurait du prendre la mer demain, restera trois jours plus dans l’île. Par ailleurs, on a appris qu’Edgard Pisani avait reçu dans le plus grand secret les principaux responsables du RPCR et du FLNKS pour préparer les divers entretiens. De son côté le maire de Nouméa a appelé à des manifestations patriotiques.
samedi 19 janvier
Après 25 heures de voyage, François Mitterrand, accompagné notamment du ministre de l’Intérieur Pierre Joxe, est arrivé en Nouvelle-Calédonie pour une visite éclair de 12 heures. Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été prises pour le recevoir. Reçu à l’aéroport par Edgard Pisani, Dick Ukeiwé, le maire de Nouméa et le député RPCR Jacques Lafleur, le chef de l’Etat a ensuite pris l’hélicoptère pour Nouméa où il a rencontré au haut-commissariat les représentants de toutes les parties concernées par l’avenir du Territoire, qu’elles soient politiques, communautaires, sociales, économiques ou bien encore culturelles. Le président de la République s’est ensuite rendu dans la brousse où il a rendu visite à la tribu kanake de Méa-Mébara, avant de rendre hommage aux actions de la gendarmerie à Poindimié. Il a repris dans la soirée l’avion vers Paris sans avoir fait aucune déclaration d’importance. De son côté, Jean-Marie Tjibaou a quitté l’île pour se rendre en Australie, puis en France. Dans la journée, plus de 30 000 personnes avaient manifesté à Nouméa, place des Cocotiers, pour la défense de la Nouvelle-Calédonie française.
dimanche 20 janvier
A peine de retour de son voyage éclair en Nouvelle-Calédonie, François Mitterrand s’est adressé aux Français à 18 heures, depuis le palais de l’Elysée, pour leur dévoiler les cinq conclusions qu’il a tiré de sa visite. Le chef de l’Etat, qui n’a pas prononcé une seule fois le mot « référendum », a annoncé une série de mesures, parmi lesquelles figure la convocation du Parlement en session extraordinaire afin de faire voter une loi prolongeant l’état d’urgence dans le Territoire. Il a déclaré que les mesures permettant la reprise économique dans l’île étaient en cours d’exécution (réouverture imminente de la mine de Thio) et que la France comptait maintenait son rôle et sa présence stratégiques dans cette partie du monde, notamment par le biais d’un renforcement de la base militaire de Nouméa. Selon un sondage IPSOS pour le Journal du Dimanche, 44 % des Français disent faire confiance au président de la République pour trouver une solution à la question de la Nouvelle-Calédonie. 31 % pensent le contraire et 50 % souhaitent une trêve des forces politiques françaises sur ce sujet.
nuit du dimanche 20 au lundi 21 janvier
Des indépendantistes kanaks ont saboté la mine de nickel de Thio. Un important matériel a été détruit. Malgré les promesses du président Mitterrand, le redémarrage de la mine n’est pas envisageable avant trois semaines.
lundi 21 janvier
Réagissant à la visite du président Mitterrand, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé affirme être convaincu que ce voyage en Nouvelle-Calédonie est « un coup destiné à abuser l’opinion publique ». Il a par ailleurs dénoncé Jean-Marie Tjibaou comme le simple chef d’une « faction minoritaire » qui cherche à imposer son pouvoir par la violence. Dans la soirée, il a décollé de Nouméa pour Paris avec deux de ses ministres. De son côté, des représentants du LKS, qui s’est désolidarisé du FLNKS, ont fait part de leur intention de se rendre également en métropole à la fin de la semaine. Recevant à Canberra Jean-Marie Tjibaou, le gouvernement australien a déclaré combien le plan Pisani leur paraissait « positif » pour l’avenir du Territoire. Le leader indépendantiste a de son côté rappelé les aspirations des Kanaks. Tenant sa première conférence de presse depuis mai 1981, l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing a déclaré soutenir la solution française pour la Nouvelle-Calédonie : se référant à l’Algérie et aux accords d’Evian, il a affirmé qu’il n’y avait aucune garantie possible concernant l’indemnisation ou la présence militaire française.
mercredi 23 janvier
Convocation à l’Assemblée nationale, en fin d’après-midi, du Parlement en session extraordinaire : le vote de la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie, adoptée dans la matinée en Conseil des ministres, a été retardé en raison d’amendements déposés par des sénateurs et d’un recours constitutionnel du RPR, qui s’est radicalisé sur ce sujet. Dès l’ouverture de la séance, la présence dans l’enceinte réservée au public, de Jean-Marie Tjibaou (invité par le PS), a causé un incident : le président du groupe RPR Claude Labbé a demandé un rappel au règlement en refusant de siéger tant que le président du FLNKS serait présent. Son départ a permis la reprise des débats. Au cours de la journée, les leaders de l’opposition avaient déjà refusé de le recevoir à sa demande. M. Tjibaou avait déclaré que même si le résultat d’un référendum était négatif concernant les revendications des indépendantistes, leur combat se poursuivra. Dans le territoire, un commando du FLNKS a saboté les équipements de la mine de nickel de Kouaoua.
nuit du mercredi 23 au jeudi 24 janvier
L’Assemblée nationale a adopté la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie jusqu’au 30 juin 1985. Seuls les socialistes ont voté pour. L’opposition est divisée sur je sujet : le RPR a voté contre et l’UDF s’est abstenue.
jeudi 24 janvier
A son tour le Sénat a débattu de la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie. Des amendements sur la réduction de six à un mois de cet état d’urgence ont été présentés par l’opposition majoritaire. Le président du territoire, Dick Ukweiwé, est intervenu à la tribune pour s’en prendre à Edgard Pisani et mettre en garde contre les effets pervers d’une telle prorogation. Le groupe RPR du Sénat a annoncé son intention de présenter un recours devant le Conseil constitutionnel.
L’Assemblée territoriale de Polynésie française a habilité le président du gouvernement polynésien à signer à Nouméa une « alliance » avec la Nouvelle-Calédonie.
nuit du jeudi 24 au vendredi 25 janvier
Le Sénat a voté la prorogation de l’état d’urgence, mais le texte a été profondément amendé avec la réduction de six à un mois de la durée durant laquelle l’île sera soumise à cette situation. L’opposition, désunie à l’Assemblée nationale, a refait son unité au Sénat.
vendredi 25 janvier
En vertu de l’article 61 de la Constitution, la loi prolongeant l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie est déférée par l’opposition au Conseil constitutionnel, avant sa promulgation. La loi est déclarée conforme et promulguée le jour même.
lundi 28 janvier
Six militants du FLNKS ont été inculpés et incarcérés pour les récents sabotages des mines de nickel, notamment à Kouaoua. Dans le même temps, une quinzaine d’employés ont commencé à nettoyer les locaux et à déblayer les obstacles dans la mine de Thio, fermée par les indépendantistes depuis plus de deux mois. Les 250 ouvriers, en grande partie wallisiens et tahitiens, avaient trouvé refuge à Nouméa avec leurs familles. Invité de l’émission L’Heure de vérité sur Antenne 2, le président du RPR Jacques Chirac a réaffirmé son soutien au statut évolutif de la Nouvelle-Calédonie proposé au Sénat par Dick Ukeiwé. A Paris, Jean-Marie Le Pen, qui tenait un meeting dans la soirée à l’Espace Ballard, a accusé le gouvernement de commettre un « complot monstrueux » contre la France.
mardi 29 janvier
Avant de quitter la France pour retourner en Nouvelle-Calédonie, le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a réuni dans la soirée 3 000 de ses partisans à Paris, à l’Espace Balard. Le chef indépendantiste calédonien y a reçu le soutien d’une cinquantaine de partis politiques (Mouvement pour la Guadeloupe indépendante, Union démocratique bretonne, etc.), de syndicats et d’associations.
mercredi 30 janvier
Edgard Pisani a remis au gouvernement une première version, intérimaire, de son plan annoncé le 7 janvier dernier. Celui-ci n’est pas définitif, le haut commissaire pour la Nouvelle-Calédonie comptant poursuivre ses entretiens pendant encore un mois à Nouméa. De son côté Dick Ukeiwé, président du gouvernement local, a remis en avant son propre projet pour le territoire, fondé sur l’autonomie, tout en demandant le retour de M. Pisani en métropole. Selon un sondage réalisé dans le Territoire par le magazine Paris-Match, si un référendum était organisé, 66 % des Néo-Calédoniens voteraient pour un maintien dans la République française contre 25 % pour l’indépendance-association.
jeudi 31 janvier
Le gouvernement de Jakarta a annoncé qu’il allait un délégué officiel en Nouvelle-Calédonie afin de prendre contact avec la communauté indonésienne qui vit dans l’île.
dimanche 3 février
Edgard Pisani s’est longuement entretenu en Nouvelle-Calédonie avec le chef du FLNKS, Jean-Marie Tjibaou.
lundi 4 février
Le haut commissaire au territoire Edgard Pisani s’est rendu en brousse, où il a notamment rencontré des éleveurs caldoches.
samedi 9 février
Le FLNKS hausse et le ton à l’occasion de son congrès tenu à huis-clos à Nakéty. Les indépendantistes se sont prononcés contre le projet Pisani de référendum et d’indépendance-association. L’action de l’organisation est restructurée : renforcement des pouvoirs du bureau politique du FLNKS. Celui-ci décide que les instances de base du Front seront les 34 comités de lutte unitaires installés dans chaque commune afin d’organiser les nouvelles actions sur le terrain et les occupations de terre. Il désigne également trente-sept députés de la Convention nationale, le « Parlement » indépendantiste chargé d'élire le gouvernement provisoire de Kanaky et d’adopter son budget. Par ailleurs Léopold Jorédié a été désigné pour succéder à Eloi Machoro en tant que ministre de la Sécurité. Enfin, le bureau politique du FLNKS appelle au boycott de l’ « école coloniale » et à la création d’écoles populaires kanakes dans les zones contrôlées par le FLNKS. A Nouméa, le président du Territoire Dick Ukeiwé a demandé le rappel en France d’Egard Pisani : il demande au président Mitterrand de nommer un autre représentant de l’Etat « susceptible de restaurer la confiance et le dialogue ».
nuit du dimanche 10 au lundi 11 février
Pour la première fois le couvre-feu n’a pas été respecté à Nouméa : plusieurs milliers de caldoches ont manifesté dans la nuit à Nouméa contre le plan Pisani, contre l’indépendance et contre l’état d’urgence à l’appel du député RPCR Jacques Lafleur. Le défilé, qui s’est déroulé sans incident, a duré trois heures. Le déploiement des forces de l’ordre a été discret.
lundi 11 février
Le Premier ministre Laurent Fabius a appelé au dialogue les adversaires de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie. Il en a profité pour renouveler sa confiance en Edgard Pisani pour la poursuite de sa mission de négociations.
mardi 12 février
Journée calme en Nouvelle-Calédonie, où le RPCR a demandé à la population de respecter à nouveau les règles du couvre-feu. Le président du Territoire, Dick Ukeiwé, a annoncé ne pas exclure une rencontre avec Edgard Pisani. Ce dernier a lancé un nouvel « appel à la raison » aux deux communautés.
mercredi 13 février
Tous deux proches du RPR, les présidents des territoires de Nouvelle-Calédonie, Dick Ukeiwé, et de Polynésie-Française, Gaston Flosse, ont signé à Nouméa une alliance de solidarité dirigée contre la politique du gouvernement central.
dimanche 17 février
De violents affrontements ont opposés indépendantistes, caldoches et gendarmes lors d’un « pique-nique » à Thio : les gendarmes sont accusés d’avoir laissé passer un grand nombre de caldoches cherchant à en découdre et d’avoir violemment chargé le « comité d’accueil » kanak de la tribu Saint-Philippo, qui déplore 11 blessés. Un fossé existerait entre les hommes sur le terrain d’une part, l’état-major de Nouméa et Edgard Pisani d’autre part : l’absence d’informations aurait entraîné des dérapages de la part des forces de l’ordre.
lundi 18 février
Une maison a été brûlée près de la tribu kanake de Saint-Philippo. A Paris, le porte-parole du Parti socialiste Jean-Pierre Destrade a demandé l’ouverture d’une enquête « très serrée » sur les incidents de la veille à Thio. Tout en dénonçant l’attitude des autorités, le FLNKS a annoncé ne pas rompre les négociations avec Edgard Pisani.
mardi 19 février
Edgard Pisani a effectué une visite surprise à Thio, où il a été reçu fraîchement par les Kanaks. Par ailleurs, l’un des auteurs présumés du sabotage de la mine de Thio, un caldoche, a été arrêté et écroué, et un autre, en fuite, a été identifié.
mercredi 20 février
Le capitaine de gendarmerie de La Foa impliqué dans les violences entre forces de l’ordre, caldoches et indépendantistes kanaks lors du « pique-nique » de Thio a été rappelé en urgence en métropole, mais sans être sanctionné. Près de Thio, une voiture a été la cible de jets de pierre de la part de membres de la tribu Saint-Philippo : victime d’une fracture du crâne, une fillette a du être héliportée en urgence à Nouméa. L’enfant était membre de la même tribu mais les agresseurs ne l’ont pas vu et ont juste constaté que l’automobile était conduite par une femme blanche…
jeudi 21 février
Les premières sanctions ont été prises par Edgard Pisani dans le cadre de l’enquête sur les récents incidents de Thio : cinq interdictions de séjour en Nouvelle-Calédonie pour troubles à l’ordre public ont été prononcées contre des militants d’extrême-droite, dont le chef du Front calédonien Claude Sarran. Sommés de quitter le territoire le 25 février, ils refusent tous les cinq de partir. Le major-général de la gendarmerie française vient par ailleurs d’arriver en Nouvelle-Calédonie.
vendredi 22 février
Le Premier ministre a fait savoir qu’il était hors de question que le gouvernement revienne sur les interdictions de séjour prises par Edgard Pisani à l’encontre de cinq militants d’extrême-droite. Laurent Fabius n’a pas l’intention de recevoir le député RPCR Jacques Lafleur à ce sujet.
samedi 23 février
Le président de l’Assemblée de Nouvelle-Calédonie Dick Ukeiwé a été empêché d’atterrir dans son île natale de Lifou : débordant le cordon d’une douzaine de gendarmes, 200 indépendantistes avaient envahi la piste de l’aérodrome local pour empêcher son avion de se poser. C’est la première fois depuis le début des événements que M. Ukeiwé tentait de retourner à Lifou, où sa maison a été incendiée à deux reprises. Par ailleurs, les cinq anti-indépendantistes qui doivent quitter le territoire le 25 février ont disparu de leurs domiciles, bien décidés à rester dans le territoire.
dimanche 24 février
Cachés quelque part dans l’île, les cinq militants d’extrême-droite menacés d’expulsion en Nouvelle-Calédonie ont réaffirmé dans un communiqué leur intention de rester sur le territoire ; ils demandent également à la population de les soutenir dans le sang-froid. Le député RPCR Jacques Lafleur a appelé à un défilé « de soutien » et « pour la liberté », dans le calme, suivie d’une journée « île morte » le 26 février, en dépit de l’état d’urgence qui interdit ce genre de manifestation.
lundi 25 février
A la veille d’une grande manifestation des anti-indépendantistes, les cinq « expulsés » n’ont pas quitté le territoire. Ils ont disparu de leur domicile depuis deux jours et se trouvent désormais en infraction avec la loi.
mardi 26 février
Entre 30 000 et 35 000 anti-indépendantistes ont défié le couvre-feu et l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie en participant à un « défilé de la liberté » organisé par le RPCR dans les rues de Nouméa. Jacques Lafleur a appelé à l’organisation d’un référendum d’ici un mois sur la base des propositions de Dick Ukeiwé. Le secrétaire d’Etat Georges Lemoine a réagi en déclarant que celui-ci ne pourrait être organisé avant la fin du mois de septembre en raison d’ « obstacles juridiques ».
jeudi 28 février
A la veille de la rentrée scolaire, le FLNKS a appelé au boycott des écoles. Les indépendantistes ont également annoncé leur annoncé d’ouvrir leurs propres établissements scolaires kanaks qui feront une grande place à l’enseignement de la langue et de la culture mélanésienne : fini « la neige » et « nos ancêtres les Gaulois » a déclaré un responsable du mouvement.
vendredi 1er mars
La rentrée scolaire en Nouvelle-Calédonie s’est déroulée dans le calme à Nouméa et dans la plus grande partie de l’île. Elle n’a cependant pas eu lieu à Thio. La consigne de boycott lancée par le FLNKS n’a été suivie que par 50 à 60 % des élèves mélanésiens, essentiellement en brousse. Par ailleurs, l’un des cinq expulsés s’est présenté de son plein gré au haut-commissariat, d’où il est ressorti libre : il a été autorisé à demeurer sur l’île à condition de se présenter deux fois par semaine aux autorités.
samedi 2 mars
Les 93 militants indépendantistes détenus à la prison de Nouméa ont entamé une grève de la faim : ils réclament le statut de prisonniers politiques et l’amélioration de leurs conditions de détention.
lundi 4 mars
La situation a dégénéré en Nouvelle-Calédonie : les gendarmes ont lancé une vaste opération d’intervention dans trois tribus kanakes de la localité de Thio afin d’y rétablir l’ordre et de procéder à l’interpellation des meurtriers du jeune Yves Thual. Plus de 400 gendarmes ont participé à cette action. Ils ont été reçus par des jets de pierre, auxquels ils ont répondu par des tirs de gaz lacrymogène. Quelques personnes ont été légèrement blessées et huit autres ont été arrêtées. Dénonçant cette opération, le FLKS a appelé à une journée du peuple kanak pour le 8 mars afin de soutenir les 93 détenus en grève de la faim.
mercredi 6 mars
En Nouvelle-Calédonie, annonce de la rencontre il y a quelques jours du chef du FLNKS, Jean-Marie Tjibaou, avec Edgard Pisani. Cette première depuis plusieurs semaines a été tenue secrète plusieurs jours. Par contre, les indépendantistes d’Ouvéa ont refusé de recevoir aujourd’hui le délégué du gouvernement. D’autre part, la gendarmerie est intervenue une deuxième fois à Thio, où des militants indépendantistes kanaks ont incendié des camions : une centaine de gendarmes mobiles ont investi la tribu Saint-Philippo 2. Enfin, à la suite d’une enquête commune franco-australienne, quatre Français ont été arrêtés en Australie pour avoir tenté de faire entrer une importante quantité d’armes sur le territoire néo-calédonien.
vendredi 8 mars
Pour la première fois depuis le début des troubles dans l’île, le FLNKS a organisé une manifestation dans les rues de Nouméa : environ 2 000 militants kanaks ont ainsi protesté contre l’incarcération de 93 indépendantistes. La fraction la plus dure du mouvement a commis diverses violences à travers toute l’île : dans le nord du territoire, un major de gendarmerie a été tué à coups de sabre à Pouébo, alors qu’il terminait avec ses collègues de déblayer un barrage établi par quatre-vingts Kanaks. Le meurtrier est parvenu à s’enfuir. L’estimant incapable de rétablir l’ordre, Dick Ukeiwé a déclaré qu’Edgard Pisani avait totalement échoué dans sa mission. Intervenant à la télévision, le président du gouvernement de l’archipel a ensuite demandé aux militants indépendantistes de déposer les armes.
vendredi 22 mars
Un mois après un premier refus de la part des responsables kanaks locaux, Edgard Pisani s’est rendu à Thio pour rendre visite à la tribu d’Eloi Machoro, le leader indépendantiste tué il y a 70 jours. Le haut-commissaire délégué du gouvernement a déclaré aux militants de base du FLNKS qu’il assumait la responsabilité de l’opération au cours de laquelle leur chef avait trouvé la mort tout en affirmant que son intention était uniquement de l’arrêter. Il a jouté qu’il s’inclinait devant la dépouilles de son adversaire. Le RPR a aussitôt protesté contre ces déclarations qui confirment que le pouvoir s’obstine à « traiter avec ceux qui se comportent en ennemis de la France et de la République ».
lundi 25 mars
A quelques jours de remettre son rapport au président Mitterrand, Edgard Pisani a tenu sa dernière conférence de presse à Nouméa. Il a averti que si le gouvernement rejetait des aspects substantiels de son projet, il lui demanderait d’en tirer les conséquences. Avant de quitter la Nouvelle-Calédonie il s’est adressé de façon originale aux deux communautés en publiant dans la presse deux lettres différentes adressées à un jeune Kanak et à un jeune Caldoche, les appelant l’un et l’autre à la modération. Il y défend une indépendance multiraciale en association avec la France.
mardi 26 mars
A peine Edgard Pisani avait-il quitté la Nouvelle-Calédonie pour rentrer à Paris, après quatre mois de mission, que Dick Ukeiwé profitait du jour d’ouverture de l’Assemblée territoriale pour présenter à Nouméa son contre-plan pour l’avenir de l’archipel. Tout en prévoyant une autonomie très poussée, celui-ci prévoit de séparer en deux parties, dans le sens de la longueur, un territoire qui demeurerait au sein de la République française. Chacune de ces deux régions disposerait d’une assemblée élue au suffrage universel. La partie occidentale, qui comprend Nouméa et la plus grande partie des terres exploitables, abriterait 73 % de la population totale, mais seulement 20 % de Mélanésiens, l’orientale, montagneuse, aride et pauvre, l’inverse. Ce plan a d’ores et déjà été rejeté par les indépendantistes kanaks représentés à l’Assemblée.
jeudi 28 mars
Edgard Pisani a remis au Premier ministre Laurent Fabius puis au président François Mitterrand son rapport sur la situation de la Nouvelle-Calédonie. Après quatre mois de mission dans l’archipel, il vient défendre en métropole son plan indépendance-association. La balle est désormais dans le camp du gouvernement, qui compte bien prendre son temps. De son côté, Dick Ukeiwé a fait savoir qu’il se rendrait également bientôt dans la capitale pour y défendre son propre plan et pour y rencontrer M. Pisani, ce qu’il avait toujours refusé de faire à Nouméa.
mardi 2 avril
Le président du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie a donné une conférence de presse à Paris, au Sénat : accusant le gouvernement français d’avoir opté pour une « stratégie du pourrissement » et reprochant à Edgard Pisani d’ « aggraver la situation » en préconisant une administration directe du territoire par l’Etat, Dick Ukeiwé réclame qu’un référendum d’autodétermination soit organisé le plus rapidement possible dans l’archipel afin de permettre la mise en place d’une plus grande autonomie. Dans l’archipel, trois Mélanésiens ont été agressés par des indépendantistes dans l’île de Lifou et l’école locale a été saccagée.
vendredi 5 avril
Ouverture au Moule, en Guadeloupe, de la « Conférence des dernières colonies françaises », qui réunit des représentants des indépendantistes de presque tous les départements et territoires d’outre-mer (à l’exception de ceux de la Polynésie française). Cette réunion est vivement contestée par l’opposition de droite qui estime que l’autoriser c’est encourager les thèses indépendantistes.
dimanche 7 avril
Clôture du sommet des indépendantistes en Guadeloupe : condamnant l’action du gouvernement français dans les départements et territoires d’Outre-Mer, ils appellent à la fin du colonialisme français. Afin de maintenir le contact entre eux, ils ont décidé de mettre en place une structure de coordination et d’information.
Deux automobilistes ont été grièvement blessés près de Bourail par des pierres jetées par de jeunes Mélanésiens.
lundi 8 avril
A Nedivin, sur la côte orientale de la Nouvelle-Calédonie, une enseignante de 46 ans d’origine européenne, Simone Heurtaux, a été tuée par des jets de pierre sur sa voiture. Touchée à la tête, elle a perdu le contrôle de son véhicule et a trouvé la mort dans l’accident. Deux jeunes Kanaks du village voisin ont été arrêtés par les gendarmes mobiles.
jeudi 11 avril
Trois jours après l’assassinat de Simone Heurtaux, les syndicats de la fonction publique (enseignants et fonctionnaires) ont lancé en Nouvelle-Calédonie un mouvement de grève de quatre jours. Environ 2 000 personnes ont manifesté dans les rues de Nouméa pour réclamer que « la sécurité des travailleurs soit garantie ». Ils demandent également que les écoles kanakes ouvertes par les indépendantistes soient déclarées illégales.
samedi 13 avril
Retiré depuis deux mois dans son village, le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a tenu une conférence de presse, déclarant qu’il attendait toujours que les Kanaks obtiennent, le plus vite possible, l’indépendance. Il a également indiqué qu’il retournera bientôt à Paris.
mercredi 17 avril
Le leader indépendantiste kanak Jean-Marie Tjibaou est arrivé à Paris pour un voyage de dix jours. Son adversaire Dick Ukeiwé est également présent dans la capitale française.
samedi 20 avril
Le responsable du Front national en Nouvelle-Calédonie, François Néoéré, a organisé une manifestation anti-indépendantiste qui a rassemblé plusieurs milliers de personnes à Nouméa, en présence du maire Roger Laroque et du député Jacques Lafleur. Une délégation du RCP a déposé au haut-commissariat un « plan de paix », véritable attaque d’Edgard Pisani. Les partisans du FLKNS leur ont répondu un peu plus tard dans la matinée. Aucun incident ne s’est produit. A Paris, c’est environ 5 000 indépendantistes qui ont défilé sous la conduite de Jean-Marie Tjibaou et d’Alain Krivine, président de la Ligue communiste révolutionnaire.
dimanche 21 avril
Le ministre de l’Intérieur Pierre Joxe a évoqué la situation en Nouvelle-Calédonie lors de son passage dans l’émission Le Club de la presse d’Europe 1. Il a insisté sur la nécessité de préserver la cohabitation entre les différentes communautés.
lundi 22 avril
Un jeune Mélanésien de 19 ans, accusé d’avoir jeté les pierres ayant tué le 8 avril l’enseignante Simone Heurtaux, s’est livré aux gendarmes de Nouvelle-Calédonie.
jeudi 25 avril
Le Premier ministre Laurent Fabius a dévoilé une série de mesures concertants le futur statut de la Nouvelle-Calédonie : le référendum sur l’autodétermination du territoire est reporté après les élections législatives de 1986 ; l’examen du plan d’ « indépendance-association » conçu par Edgard Pisani doit avoir lieu avant le 31 décembre 1987 ; les modalités d’application du « régime transitoire » sont précisées. Institution de quatre collectivités territoriales, dénommées « régions ». Celles-ci seront dirigées chacune par un « conseil » élu au suffrage universel et à la proportionnelle ; ces quatre conseils formeront un unique « congrès » qui remplacera l’assemblée territoriale actuelle.
vendredi 26 avril
Conférence de Jean-Marie Tjibaou : tout en reconnaissant la prise en compte du peuple kanak en faveur de l’indépendance, le leader du FLNKS condamne le report du référendum prévu à ce sujet.
dimanche 28 avril
Second congrès du Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR, proche du RPR), organisé à Nouméa devant 3 000 personnes : Jacques Lafleur a été réélu à l’unanimité président d’un mouvement qui rejette en bloc le plan du gouvernement. S’estimant persécuté par les socialistes depuis 1981, le parti de Dick Ukeiwé est prêt au dialogue mais également bien décidé à lutter activement contre l’indépendance.
lundi 29 avril
Evoquant une « profonde inégalité démographique » dans leur composition, le Conseil d’Etat a émis des réserves sur les quatre « régions » créées en Nouvelle-Calédonie par le gouvernement français.
Intervenant dans le cadre de l’enquête sur le meurtre du jeune Yves Tual le 11 janvier dernier, la gendarmerie a procédé à l’arrestation de 12 Mélanésiens dans la région de Thio. Toutes les personnes interpellées ont été rapidement relâchées mais ces opérations ont déclenché un mouvement de colère des Kanaks locaux : les employés mélanésiens de la mine de nickel se sont mis en grève pour 24 heures.
mardi 30 avril
Le Conseil des ministres a adopté le projet de loi instaurant un statut transitoire pour la Nouvelle-Calédonie, avec la mise en place en place de quatre « régions » administratives dans le territoire (Nord, Centre et Sud-Est, îles Loyauté et Agglomération de Nouméa) dotées de leur propre assemblée. Le rôle du haut-commissaire sera accru. Le texte a aussitôt été transmis. A Maré, dans les îles Loyauté, des militants du FLNKS séquestrent trente-sept membres du service d’ordre du gouvernement calédonien.
vendredi 3 mai
Mis en place le 12 janvier dernier, le couvre-feu est levé en Nouvelle-Calédonie. L’état d’urgence reste cependant en vigueur.
mercredi 8 mai
Retour de la violence en Nouvelle-Calédonie. Malgré l’interdiction du haut-commissariat et l’annulation de la direction du FLNKS, trois cents militants indépendantistes ont manifesté à Nouméa pour protester contre l’installation d’une base militaire. Ce rassemblement de trois cents militants a provoqué la colère des durs du RPCR. Débordant les forces de l’ordre, des dizaines d’anti-indépendantistes, casqués et armés de barres de fer, sont intervenus, prenant en chasse les Kanaks jusque dans la banlieue. Les affrontements ont duré plusieurs heures dans la capitale du Territoire, où des armes à feu ont également été utilisées. Un jeune Mélanésien de 19 ans, Célestin Zongo, a été tué par une balle de gros calibre et une centaine de personnes ont été blessées, dont dix grièvement. Le couvre-feu a été rétabli à 20 heures. Invoquant un cas de légitime-défense, Dick Ukeiwé exige le rappel en métropole d’Edgard Pisani. Ce dernier met en cause le RPCR, accusé d’avoir souvent violé l’ordre public.
jeudi 9 mai
Le calme est revenu en Nouvelle-Calédonie mais les violences de la veille ont entraîné la démission des sept élus indépendantistes modérés de l’Assemblée territoriale. Ces membres du LKS accusent le RPCR d’avoir organisé une véritable « chasse aux Kanaks ». L’Assemblée se compose désormais uniquement de 35 élus du RPCR. A Nouméa, 300 lycéens, Mélanésiens et Européens confondus, ont organisé une marche à la mémoire de leur camarade tué la veille.
vendredi 10 mai
En ce vendredi, proclamé « jour de deuil » par le FLNKS, des heurts se sont produits à Nouméa devant le lycée La Pérouse : des jets de pierre ont été échangés entre trois cents lycéens européens et wallisiens installés devant l’établissement et 150 mélanésiens retranchés dans l’internat, protégés par un cordon de CRS. Les cours avaient été suspendus après qu’une réunion du SNES ait été interrompue par une vingtaine d’élèves. Des tensions demeurent également en brousse, à Thio et à Lifou, où une patrouille de gendarme a du dégager un barrage indépendantiste à coups de grenades lacrymogène. Le ministre de la Défense est arrivé dans l’archipel à bord du sous-marin d’attaque Le Rubis, qui doit rester dans le territoire entre dix et douze semaines. Charles Hernu a aussitôt visité diverses installations militaires de l’île.
lundi 13 mai
Quatre attentats à l’explosif non revendiqués ont été commis en Nouvelle-Calédonie, dont trois à Nouméa. En métropole, des partis et diverses organisations d’extrême-gauche ont organisé à Paris une manifestation de soutien aux indépendantistes kanaks.
mardi 21 mai
Nommé le 1er décembre 1985, le Haut-Commissaire de la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani est rappelé en métropole pour entrer au gouvernement en tant que ministre chargé du territoire calédonien. Il a pour mission de préparer le futur statut de l’archipel. Le diplomate Fernand Wibeaux est nommé pour le remplacer au poste de Haut-Commissaire. Dick Ukeiwé ne cache pas sa satisfaction du départ d’Edgard Pisani. Tout en ressemblant à une promotion, cette nomination au poste de ministre ressort également comme un aveu de l’usure et de l’incapacité de M. Pisani. Par ailleurs, les élections aux Conseils de région ont été fixées aux 22 et 23 août.
mercredi 22 mai
A peine arrivé à Paris, le nouveau ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a été reçu à l’Elysée par le président Mitterrand. Dans l’après-midi, il était présent à l’Assemblée nationale, sur le banc des ministres, pour assister à la séance de questions d’actualité.
jeudi 23 mai
L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi sur le statut transitoire de la Nouvelle-Calédonie.
vendredi 24 mai
Reconnu coupable d’ « atteinte à l’intégrité du territoire national », le président du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a été condamné à un an de prison avec sursis et 10 000 francs d’amende par la 17e chambre correctionnel de Paris. La plainte avait été déposée par le gouvernement territorial calédonien. Les avocats de M. Tjibaou et le procureur de la République ont immédiatement fait appel.
samedi 25 mai
Ouverture à Hienghène, dans le nord de Grande-Terre, du troisième congrès du FLNKS. Adversaires et partisans de la ligne prônée par Jean-Marie Tjibaou s’affrontent.
dimanche 26 mai
Suite et fin du congrès du FLNKS à Hienghène : à l’issue d’âpres discussions, les extrêmes du mouvement ont fini par accepter la position de compromis et la ligne politique de Jean-Marie Tjibaou. Tout en se prononçant contre l’idée générale du projet Fabius, les indépendantistes présenteront des candidats aux élections aux conseils de région du mois d’août. Les délégués ont refusé l’installation de bases militaires dans l’archipel.
mercredi 29 mai
A l’Assemblée nationale, les députés ont commencé à discuter du projet de loi sur le futur statut de la Nouvelle-Calédonie.
jeudi 30 mai
Dans la soirée, les députés ont voté les articles du projet de référendum et d’indépendance-association de la Nouvelle-Calédonie.
vendredi 31 mai
L’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie a donné un avis consultatif défavorable au projet de référendum et d’indépendance-association du territoire proposé par Edgard Pisani en janvier dernier. Par ailleurs, Fernand Wibaux succède officiellement à Edgard Pisani comme haut-commissaire de l’archipel.
mardi 4 juin
A Paris, les députés ont adopté le projet de loi sur l’évolution de la Nouvelle-Calédonie.
samedi 8 juin
Des militants du FLNKS ont manifesté en Nouvelle-Calédonie contre l’établissement d’une base militaire stratégique à Nouméa.
vendredi 14 juin
Le ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani, a décrété la levée du couvre-feu dans le territoire.
jeudi 20 juin
Le président du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie, Dick Ukeiwé, a déclaré à Nancy qu’il était opposé au nouveau statut de l’archipel. Il demande, en cas de victoire de l’opposition aux législatives de 1986, l’organisation d’un référendum sur l’autodétermination.
dimanche 30 juin
L’état d’urgence, proclamée le 12 janvier par Edgard Pisani a été levée en Nouvelle-Calédonie.
mardi 23 juillet
Ouverture au Sénat du débat sur le futur statut de la Nouvelle-Calédonie. Dans leur majorité, les élus disent « oui » aux élections et à la réforme (mais avec des amendements) mais « non » à l’indépendance et à l’état d’urgence.
vendredi 26 juillet
Les députés ont définitivement adopté le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie.
lundi 29 juillet
Les gendarmes venus arrêter un jeune Mélanésien de dix-neuf ans soupçonné du meurtre d’Yves Thual en janvier dernier en ont été empêchés dans la soirée par la tribu Saint-Philippo II. Le pont menant de la mine de Thio à l’embarcadère du chargement de nickel a été bloqué.
mardi 30 juillet
Regain de tension en Nouvelle-Calédonie : afin de protéger l’un de ses membres, soupçonné du meurtre d’Yves Thual, une centaine de membres de tribu Saint-Philippo II paralysent le village de Thio. Jets de pierre répondent aux grenades lacrymogènes des gendarmes et les tirs de fusils de chasse aux rafales de mitraillettes. Impliqués dans l’opération, trois escadrons de gendarmerie, quatre blindés et six hélicoptères sont parvenus à lever les barrages. Six personnes ont été blessées. Le FLNKS a appelé à la mobilisation tous les comités de lutte de la Kanakie.
nuit du mardi 30 au mercredi 31 juillet
Plusieurs maisons ont été incendiées par des inconnus à Thio. Une trentaine de personnes ont été contraints de se réfugier dans la gendarmerie.
jeudi 1er août
Thio reste coupée du reste de la Nouvelle-Calédonie par les barrages. Mais des négociations semblent avoir lieu entre indépendantistes et autorités.
lundi 5 août
Des représentants des indépendantistes et des Caldoches se sont rencontrés à la mairie de Thio : un accord a été conclu sur le principe de la reprise de l’activité à la mine de nickel locale.
lundi 6 août
L’Australie, les Fidji, les îles Cook, Kiribati, Niue, la Nouvelle-Zélande, les Samoa et Tuvalu ont signé le traité de Rarotonga (îles Cook) sur la création d’une zone d’exclusion des armes nucléaires dans le Pacifique sud. Les grandes puissances occidentales de la région (Etats-Unis, France, Royaume-Uni) devront être consultées pour voir leurs territoires réciproques inclus dans ce traité. Hostiles aux expériences nucléaires françaises de Mururoa, les Etats océaniens sont également favorables à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie.
Conformément à l’accord conclu la veille, le travail a repris à la mine de nickel de Thio.
mercredi 7 août
Adoptant les méthodes de lutte des Kanaks, des anti-indépendantistes ont installé un barrage sur un pont à Témala, dans le nord de la Nouvelle-Calédonie.
jeudi 8 août
Le Conseil constitutionnel a émis des réserves sur la loi relative à l'évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Le point qui pose problème est l’article concernant le nombre de conseillers dans les quatre conseils de régions, et plus particulier dans celui de la région de Nouméa : l’inégalité de représentation serait trop grande. Cet article ayant été annulé, les dates des élections à ces conseils, prévues en septembre, sont reportées.
vendredi 9 août
Suite aux réserves émises la veille par le Conseil constitutionnel, le président Mitterrand a convoqué le Parlement en session extraordinaire pour le 12 août.
samedi 10 août
Divers mouvements indépendantistes (FNKS, Basques français et espagnols, irlandais, guadeloupéens, arméniens) participent aux Journées internationales de Corte qui s’ouvrent ce jour en Haute-Corse. Elles sont organisées par le Mouvement corse pour l’autodétermination (MCA).
lundi 12 août
Début à 15 heures, dans une ambiance tendue, de la session extraordinaire de l’Assemblée nationale. 160 députés ont interrompus leurs vacances pour réexaminer la loi concernant l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Plusieurs rappels au règlement ont été nécessaires pour obtenir le calme dans l’Assemblée. L’ancien président Valéry Giscard d’Estaing et Michel Debré ont déclaré que la procédure employée par le chef de l’Etat et le gouvernement pour faire adopter le texte était non constitutionnelle.
nuit du lundi 12 au mardi 13 août
Les députés ont adopté un amendement à la loi sur l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. La région de Nouméa comptera 21 conseillers au lieu des 18 prévus initialement. L’opposition réclamait encore plus d’élus. Le Parti communiste a voté contre. Le texte doit maintenant être étudié par le Sénat.
mardi 13 août
Réunis de façon extraordinaire, comme les députés, les sénateurs ont reporté au 19 août leur examen du texte sur l’évolution du statut néo-calédonien. La faute aux accusations portées la veille par Giscard d’Estaing et Debré sur la caractère non constitutionnel de la méthode utilisée par le gouvernement et le chef de l’Etat. Il est désormais évident que l’opposition saisira le Conseil constitutionnel à ce sujet.
nuit du jeudi 15 au vendredi 16 août
La police a arrêté à Nouméa neuf personnes qui affirment appartenir à un service de sécurité du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie.
lundi 19 août
Ouverture au Sénat du débat sur la Nouvelle-Calédonie. Avant même l’ouverture des discussions, l’opposition a annoncé qu’elle déposera un nouveau recours devant le Conseil constitutionnel pour contester la procédure utilisée par le président de la République.
mardi 20 août
Après un débat fort houleux, les sénateurs ont voté la loi relative à l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Le texte, revenu aussitôt à l’Assemblée nationale, a été adopté définitivement dans la soirée par les députés, et sans les amendements déposés par l’opposition : le nombre d’élus de la région de Nouméa demeure à 21 et non au moins 25 comme le souhaitait la droite. La procédure utilisée par le président de la République doit maintenant être étudiée par le Conseil constitutionnel.
jeudi 22 août
Après une visite mouvementée à Thio, François Léotard est de retour à Nouméa. Prenant la parole devant plusieurs milliers d’anti-indépendantistes, le secrétaire général du Parti républicain, accompagné de Jacques Médecin et de Roger Chinaud, a lancé un double avertissement, à certains ministres australiens et à certains fonctionnaires « politisés ». Il a déclaré que la nouvelle majorité qui arrivera au pouvoir dans quelques mois saura se souvenir de certaines déclarations prononcées en Australie sur la situation intérieure de la France. Le gouvernement parle d’un chantage menaçant honteux adressé aux fonctionnaires de l’île. M. Léotard affirme également que les forces de police et de gendarmerie ont reçu l’ordre de ne pas intervenir en cas de violences.
vendredi 23 août
Le Conseil constitutionnel a adressé un revers à l’opposition en rejetant ses deux recours déposés, d’une part contre la procédure utilisée par le président de la République (recours à l’article 10) concernant l’adoption de la nouvelle loi relative à l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie et d’autre part sur le nombre de conseillers régionaux. Le statut Fabius-Pisani est officiellement confirmé : création de quatre régions (Sud, Centre, Nord et Iles), chacune disposant d’un conseil élu au suffrage universel à la proportionnelle de liste et formant un Congrès du Territoire (qui remplace l’Assemblée territoriale). Maintenu en place, le Haut-Commissaire sera désormais secondé par un Conseil exécutif dirigé par le président du Congrès et composé des quatre présidents de Région. Par ailleurs, un conseil consultatif coutumier sera créé dans chaque région.
lundi 26 août
Réagissant aux propos polémiques de François Léotard, les ministres de la Défense et de l’Intérieur, Charles Hernu et Pierre Joxe, ont demandé au secrétaire général du Parti républicain de produire dans les délais les plus brefs les preuves de ses accusations portées contre les fonctionnaires et magistrats de Nouvelle-Calédonie. Ils ont menacé de saisir la justice pour « injures, diffamation et outrages ».
mercredi 28 août
Le conseil des ministres a confirmé l’organisation des élections régionales en Nouvelle-Calédonie pour le 29 septembre. Le ministre chargé du territoire, Edgar Pisani, a déclaré que des mesures spéciales seront prises à cette occasion pour assurer le bon déroulement du scrutin (bureaux de vote présidés par des magistrats, etc.). Par ailleurs, les sections de l’USM et du Syndicat de la magistrature de Nouméa ont à leur tour exigé de François Léotard qu’il présente les preuves de ses accusations lancées il y a quelques jours contre les fonctionnaires et les magistrats de l’île.
jeudi 29 août
Fin officielle des fonctions du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie.
jeudi 5 septembre
Regain de tension sur la côte est de la Nouvelle-Calédonie : des barrages ont été dressés par des indépendantistes de Ponerihouen qui réclament l’expulsion d’une famille dont l’un des fils a grièvement blessé une jeune Kanake la veille.
samedi 7 septembre
Les derniers barrages installés entre Ponerihouen et Houaïlou ont été levés par les gendarmes. Mais l’ultimatum des indépendantistes locaux demeure.
mercredi 11 septembre
Le FLNKS est dépassé par sa base en Nouvelle-Calédonie : agressions, incendies criminels et caillassages (jets de pierres) se succèdent dans l’île.
jeudi 12 septembre
Le gouvernement a publié le décret sur le renforcement de la base stratégique de Nouméa. Il est également prévu d’agrandir la piste aérienne.
samedi 14 septembre
Gisèle Maohi a été élue Miss Nouvelle-Calédonie.
lundi 16 septembre
En visite en Nouvelle-Calédonie, le secrétaire général du RPR Jacques Toubon a présenté à Nouméa les propositions de son parti concernant l’avenir du territoire. Si l’opposition remporte les élections législatives de 1986 elle compte notamment organiser un référendum sur le maintien de l’archipel au sein de la République française.
dimanche 22 septembre
Lancement de la première radio indépendantiste de Nouméa, Radio Canaque.
mardi 24 septembre
Arrivées en série en Nouvelle-Calédonie à quatre jours des élections locales : le président du RPR Jacques Chirac et le secrétaire national du Parti républicain François Léotard ont été rejoints quelques heures plus tard par Jean-Marie Le Pen, ce dernier ayant bien soin d’éviter de prendre le même avion que les deux autres responsables de l’opposition. Accueilli par un millier de partisans, le président du Front national a reçu une lettre de Dick Ukeiwé lui demandant de retirer son candidat dans la région Centre afin d’éviter que celle-ci ne tombe aux mains des indépendantistes.
mercredi 25 septembre
Après un déplacement à Bourail, Jacques Chirac et François Léotard ont tenu à Nouméa, sur la place des Cocotiers, un meeting commun « bleu, blanc, rouge » devant plus de 7 000 personnes. Dénonçant le projet d'indépendance-association, jugé « malhonnête et indigne », le président du RPR s’est prononcé en faveur d’un référendum d’autodétermination et de la mise en place d’une aide exceptionnelle pour favoriser le développement du territoire. S’adressant aux indépendantistes, il a rajouté : « Vous êtes chez vous mais nous sommes aussi chez nous car nous avons tous ici notre place dans un destin commun : Mélanésiens, Caldoches venus de la vieille Europe mais aussi Wallisiens, Tahitiens ou Asiatiques. Oui, nous sommes chez nous car nous sommes en France ! ».
nuit du mercredi 25 au jeudi 26 septembre
A 1 heure du matin (heure locale), un attentat à la bombe a frappé à Nouméa l’Office de développement de l'intérieur et des îles (ODIL), dirigé par un militant du FLNKS. Tout le quatrième étage d’un immeuble a été soufflé.
jeudi 26 septembre
Campagne électorale en Nouvelle-Calédonie : le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a dénoncé le déploiement des forces de l’opposition venues de métropole. Par ailleurs, le Front national a accepté de retirer sa liste de la région centre au profit du RPCR.
dimanche 29 septembre
Elections régionales en Nouvelle-Calédonie : bien que n’ayant obtenu que 39,15 % des voix (avec ses alliés), le FNLKS crée la surprise et profite du découpage pour remporter trois régions : Jean-Marie Tjibaou dans le Nord avec 6 sièges, contre 2 au RPCR et 1 au RPC ; Léopold Jorédié dans le Centre avec 5 élus contre 4 au RPCR ; Yeivéné Yeiwéné dans les îles Loyauté avec 4 sièges, contre 2 au RPCR et 1 au LKS. Avec 60,585 % des suffrages, les anti-indépendantistes ne gagnent que la région Sud (Jean Lègues, avec 17 élus RPCR, contre 3 au Front national et 1 seul au FLNKS). Le RPCR peut cependant se consoler en obtenant, comme prévu, la majorité au Congrès (26 élus RPCR, 16 FLNKS, 3 FN et 1 LKS), dont la présidence doit revenir à Dick Ukeiwé. Le taux de participation était très important : près de 80 %. Le scrutin s’est déroulé dans le calme, sans aucun incident signalé. Déçus par la perte de la région Centre, MM. Ukeiwé, Lafleur et Pons ont immédiatement dénoncé le statut Pisani et plus particulièrement le découpage des régions. Celui-ci est également très attaqué en métropole par l’opposition de droite.
lundi 30 septembre
Première réaction de Jacques Chirac après les élections de Nouvelle-Calédonie : le président du RPR se déclare non surpris par les résultats et prévient qu’en cas de victoire de l’opposition aux législatives de 1986 il y aura immédiatement un scrutin d’autodétermination dans l’archipel suivi d’un nouveau statut donnant une large autonomie au territoire.
vendredi 4 octobre
Changement de stratégie au sein du FLNKS : le nouveau héros des indépendantistes, Léopold Jorédié, a accepté de rencontrer Dick Ukeiwé afin de gérer au mieux les trois régions où ils sont majoritaires.
lundi 7 octobre
Réunion du premier congrès de Nouvelle-Calédonie, issu des élections du 29 septembre : 29 anti-indépendantistes (26 RPCR et 3 FN) font face à 18 indépendantistes (16 FLNKS et 1 LKS) dans une ambiance tendue. Comme prévu, le RPCR Dick Ukeiwé a été élu président : il a appelé la population du territoire à une « résistance légitime ».
jeudi 10 octobre
Dick Ukeiwé a déposé un recours devant le Conseil d’Etat : il conteste les résultats des élections du 29 septembre en raison, affirme-t-il, de multiples fraudes observées dans la région Centre.
nuit du dimanche 20 au lundi 21 octobre
De violents affrontements entre Mélanésiens ont fait des dizaines de blessés sur l’île de Lifou, dans l’archipel des Loyauté.
mercredi 13 novembre
Signature des premières ordonnances régissant les nouveaux rapports entre le gouvernement et la Nouvelle-Calédonie. Elle concerne le nouveau régime foncier et l’éducation. Le ministre Edgard Pisani considère désormais que son ministère n’a plus raison d’être.
vendredi 15 novembre
Remaniement ministériel : le ministère de la Nouvelle-Calédonie est supprimé et son titulaire, Edgard Pisani, est nommé chargé de mission à l’Elysée.
lundi 18 novembre
Décès en Nouvelle-Calédonie de Roger Laroque. Membre fondateur du RPCR, il était maire de Nouméa depuis 1953. Son premier adjoint, Jean Lèques, assure l’intérim dans l’attente de nouvelles élections.
jeudi 21 novembre
Arrestation en Nouvelle-Calédonie de l’assassin du jeune caldoche Yves Thual, tué le 11 Janvier. Maurice Moindou, un Mélanésien de 19 ans, était sous le coup d’un mandat d’amener depuis le mois de mars.
nuit du lundi 2 au mardi 3 décembre
Un attentat non revendiqué a ravagé le palais de justice de Nouméa. Il n’y a pas de victime mais les dégâts sont si importants que le bâtiment devra probablement être rasé avant d’être reconstruit.
lundi 30 décembre
Les douanes néo-zélandaises ont saisi dans le port d’Auckland du matériel militaire (8 000 cartouches, pièces détachées d’armes automatiques) à bord d’un cargo français. L’Ile-de-Lumière fait la navette entre l’Australie (où aurait été embarquée la marchandise), la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie. C’est la troisième fois qu’un tel trafic est découvert en quelques mois entre l’Australie et la Nouvelle-Calédonie, un territoire où la vente de munitions est actuelle interdite.
Trois attentats ont été commis dans la nuit de la Saint-Sylvestre à Nouméa, contre la Poste centrale (explosion dans le local des boîtes postales), dix plus tard contre un magasin d’alimentation du bord de mer et enfin contre une voiture particulière située dans un parking résidentiel : des dégâts matériels importants mais pas de blessé.
mardi 1er janvier
Une personne a été tuée à Nouméa.
mercredi 2 janvier
Le président du gouvernement calédonien Dick Ukeiwé a condamné les attentats de la nuit de la Saint-Sylvestre.
samedi 5 janvier
Dans une interview accordée au journal le Monde, le député RPCR de Nouvelle-Calédonie Jacques Lafleur déclare que l’indépendance du territoire serait une « stupidité ».
dimanche 6 janvier
Si le calme demeure, la tension est remontée d’un cran en Nouvelle-Calédonie à la veille de la présentation du plan d’Edgard Pisani pour l’avenir du territoire. Certaines tribus ont remonté des barrages par crainte des réactions des anti-indépendantistes à l’annonce des mesures. A Nouméa, un comité de crise a été formé pour apporter son soutien au gouvernement légal de l’île.
lundi 7 janvier
Le délégué du gouvernement Edgard Pisani a dévoilé son plan pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Le point le plus important concerne un référendum organisé au mois de juillet qui donnera le choix entre le maintien dans la République française ou la création d’un Etat indépendant associé à la France. Le droit de vote pour y participer nécessiterait une présence d’au moins trois ans sur le territoire. Un statut spécial serait réservé à Nouméa. Le FLNKS déclare sa satisfaction de voir ramener de 1989 à 1985 une telle consultation. De son côté, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé et son parti, le RPCR, disent toujours non à l’indépendance et oui au statut Lemoine.
jeudi 10 janvier
Edgard Pisani a commencé ses consultations auprès des forces politiques de Nouvelle-Calédonie. Après avoir d’abord bien accueilli le plan du délégué du gouvernement, les indépendantistes contestent maintenant la composition du corps électoral appelé à se prononcer lors du référendum de juillet. Nidoish Naisseline, responsable du parti Libération kanak socialiste (LKS) et grand chef de la tribu de Guahma, a notamment fait connaître son insatisfaction. Les représentants de la communauté wallisienne, estimée à 15 000 personnes, se sont alignés en conférence de presse sur la ligne anti-indépendantiste du RPCR.
vendredi 11 janvier
Un jeune Caldoche de 17 ans, Yves Tual, a été tué par des militants indépendantistes sur la propriété de ses parents située au col de Nassirah, près de Thio, dont le maire est l’oncle de la victime ainsi que le seul élu du Front national au Parlement territorial. Le jeune homme effectuait une ronde pour protéger le bétail familial avec son père, qui a tiré au-dessus d’un buisson. Des hommes cachés dans les fourrées ont alors répliqué.
nuit du vendredi 11 au samedi 12 janvier
Le décès d’Yves Tual a entraîné de violentes émeutes anti-indépendantistes à Nouméa. Des commerces appartenant à des personnalités indépendantistes ont été pris d’assaut, incendiés ou pillés : la pharmacie générale (propriété de Maurice Lenormand), la station service d’André Dang, etc. Le siège du FLNKS, menacé, a été protégé par un grand nombre de ses militants. Des manifestants loyalistes ont convergé vers le Haut-commissariat, où de violents affrontements se sont produits avec les forces de l’ordre : tirs de grenade lacrymogène ont répondu aux lancers de cocktails Molotov. Le bilan des violences se chiffre à 48 blessés et 51 arrestations. Ailleurs dans l’île la villa de Jean Guyart, ethnologue favorable à l’indépendance, a été incendiée.
samedi 12 janvier
La crise s’aggrave en Nouvelle-Calédonie : le leader radical Eloi Machoro, « ministre de la Sécurité » du gouvernement provisoire de Tjibaou, a été tué d’une balle dans la poitrine par un membre du GIGN au cours d’une opération des gendarmes contre une ferme La Foa, où les indépendantistes retenaient prisonnier le propriétaire européen. Machoro avait 39 ans. Un autre militant indépendantiste, Marcel Nonnaro, a été tué par un autre gendarme. Les deux auteurs des tirs sont aussitôt exfiltrés de l’île. Tout au long de la journée, des manifestants anti-indépendantistes s’en sont violemment pris aux forces de l’ordre à Nouméa, faisant une cinquantaine de blessés de part et d’autre. Une station-service appartenant à Vietnamien soupçonné d’être proche du FLNKS a été incendié. Réunis en centre-ville, un millier de personnes ont bruyamment applaudi lorsque le maire Roger Laroque a annoncé la mort d’Eloi Machoro, une annonce qui a détenu l’atmosphère envers les gardes-mobile présents. Invoquant l’article 119 de la loi du 6 septembre 1984, Edgard Pisani a proclamé l’état d’urgence et le couvre-feu dans l’ensemble du territoire. Intervenant à la télévision, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé a lancé un appel solennel au retour au calme. Jean-Marie Tjibaou a de son côté déclaré rejeter en bloc toutes les propositions du délégué du gouvernement en raison de « l’assassinat d’Eloi Machoro ». Tout en réaffirmant que celles-ci étaient « raisonnables », le Premier ministre Laurent Fabius a annoncé l’envoi de mille hommes en renfort pour assurer l’ordre en Nouvelle-Calédonie (ce qui portera sur place les effectifs de CRS et de gardes-mobile à 3 280, sans compter les 3 000 militaires stationnées dans l’île). A Paris, le sénateur RPR Charles Pasqua demande qu’Edgar Pisani soit relevé de ses fonctions et Jean-Marie Le Pen réclame que le Premier ministre se rende en Nouvelle-Calédonie pour prendre la responsabilité des opérations.
nuit du samedi 12 au dimanche 13 janvier
En dehors des titulaires d’un laissez-passer officiel, plus personne ne circule dans les rues de Nouméa après 19 heures.
dimanche 13 janvier
Les obsèques du jeune caldoche Yves Thual, tué par des indépendantistes il y a deux jours, se sont tenues dans une ambiance tendue, mais dans le calme. Le président du gouvernement local, les maires de Thio (oncle de la victime) et de Nouméa ont assisté à la cérémonie. Dick Ukeiwé s’est ensuite adressé une nouvelle fois à la population pour lui demander de ne plus manifester et de respecter l’état d’urgence. Une polémique a éclaté sur les circonstances de la mort d’Eloi Machoro. Sa famille conteste le rapport balistique et les circonstances dans lesquelles il a été tué. Edgard Pisani affirme qu’il n’y a jamais d’ordre de « tirer pour tuer ». Le FLNKS a annoncé trois jours de deuil et un syndicat indépendantiste a appelé à la grève pour les 14 et 15 janvier.
Le président du groupe communiste à l’Assemblée nationale André Lajoinie était l’invité du Club de la presse d’Europe 1. Il a notamment exprimé ses doutes sur la version officielle concernant la mort du leader indépendantiste calédonien Eloi Machoro. S’exprimant devant les jeunes giscardiens, l’ancien président Giscard d’Estaing a pour sa part accusé le gouvernement d’avoir commis plusieurs fautes graves dans l’affaire calédonienne.
nuit du dimanche 13 au lundi 14 janvier
Pour la deuxième nuit consécutive, le couvre-feu a été respecté en Nouvelle-Calédonie.
lundi 14 janvier
En application de la loi du 3 avril 1955, le Premier ministre confère par décret au Haut-Commissaire de la République Edgard Pisani les pouvoirs extraordinaires qu’il pourra exercer au cours de toute la durée de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie. La population kanake a rendu un dernier hommage à Eloi Machoro et à Marcel Nonnaro dont les obsèques ont été célébrées ce jour. Les dépouilles ont quitté en convoi la morgue de Nouméa pour être inhumées sur les terres de leur tribu Gélima, près de Thio. Le FNLKS accuse toujours les forces de l’ordre d’avoir assassiné les deux hommes sur un ordre venu de très haut. Les indépendantistes se déclarent cependant toujours ouverts à la discussion. Dans le port de Thio, trois thoniers ont été détruits par des bombes. A Paris, quelques centaines de partisans de l’indépendance du territoire (anarchistes, libertaires, communistes, etc.) ont manifesté sans incident du Panthéon à l’hôtel Matignon, tandis qu’une messe a été organisée en l’église Saint-Augustin à la mémoire d’Yves Thual, à la demande du Front national (Jean-Marie Le Pen était présent au premier rang).
mardi 15 janvier
Le ton continue à monter en Nouvelle-Calédonie côté indépendantiste : le chef du FLNKS Jean-Marie Tjibaou accuse directement Edgard Pisani d’avoir donné son accord au « meurtre » d’Eloi Machoro. Les indépendantistes accusent également les extrémistes caldoches d’avoir attaqué le 13 janvier la morgue de Nouméa où reposait le corps de M. Machoro, une attaque qui aurait été repoussé par les militants kanaks. Sur le terrain, l’état d’urgence, respecté, a été assoupli. Un diplomate américain a effectué une visite dans l’île. Washington craint que le mouvement kanak n’entraîne une déstabilisation du Pacifique Sud. A Paris, le RPR a annoncé qu’il rejetait désormais le plan Pisani de façon catégorique et définitive.
mercredi 16 janvier
Intervention dans la soirée du président Mitterrand sur Antenne 2. Concernant le dossier brûlant de la Nouvelle-Calédonie, il a annoncé qu’il partirait demain à destination du territoire français pour une brève visite.
jeudi 17 janvier
Le président Mitterrand a quitté la France dans la soirée à destination de la Nouvelle-Calédonie. Sur place, dans l’attente de l’arrivée du chef de l’Etat, des mesures de sécurité exceptionnelles ont commencé à être prises : 5 000 militaires sont mobilisés, tous les véhicules entrant dans Nouméa sont fouillés et le navire-école Jeanne-d’Arc, qui aurait du prendre la mer demain, restera trois jours plus dans l’île. Par ailleurs, on a appris qu’Edgard Pisani avait reçu dans le plus grand secret les principaux responsables du RPCR et du FLNKS pour préparer les divers entretiens. De son côté le maire de Nouméa a appelé à des manifestations patriotiques.
samedi 19 janvier
Après 25 heures de voyage, François Mitterrand, accompagné notamment du ministre de l’Intérieur Pierre Joxe, est arrivé en Nouvelle-Calédonie pour une visite éclair de 12 heures. Des mesures de sécurité exceptionnelles ont été prises pour le recevoir. Reçu à l’aéroport par Edgard Pisani, Dick Ukeiwé, le maire de Nouméa et le député RPCR Jacques Lafleur, le chef de l’Etat a ensuite pris l’hélicoptère pour Nouméa où il a rencontré au haut-commissariat les représentants de toutes les parties concernées par l’avenir du Territoire, qu’elles soient politiques, communautaires, sociales, économiques ou bien encore culturelles. Le président de la République s’est ensuite rendu dans la brousse où il a rendu visite à la tribu kanake de Méa-Mébara, avant de rendre hommage aux actions de la gendarmerie à Poindimié. Il a repris dans la soirée l’avion vers Paris sans avoir fait aucune déclaration d’importance. De son côté, Jean-Marie Tjibaou a quitté l’île pour se rendre en Australie, puis en France. Dans la journée, plus de 30 000 personnes avaient manifesté à Nouméa, place des Cocotiers, pour la défense de la Nouvelle-Calédonie française.
dimanche 20 janvier
A peine de retour de son voyage éclair en Nouvelle-Calédonie, François Mitterrand s’est adressé aux Français à 18 heures, depuis le palais de l’Elysée, pour leur dévoiler les cinq conclusions qu’il a tiré de sa visite. Le chef de l’Etat, qui n’a pas prononcé une seule fois le mot « référendum », a annoncé une série de mesures, parmi lesquelles figure la convocation du Parlement en session extraordinaire afin de faire voter une loi prolongeant l’état d’urgence dans le Territoire. Il a déclaré que les mesures permettant la reprise économique dans l’île étaient en cours d’exécution (réouverture imminente de la mine de Thio) et que la France comptait maintenait son rôle et sa présence stratégiques dans cette partie du monde, notamment par le biais d’un renforcement de la base militaire de Nouméa. Selon un sondage IPSOS pour le Journal du Dimanche, 44 % des Français disent faire confiance au président de la République pour trouver une solution à la question de la Nouvelle-Calédonie. 31 % pensent le contraire et 50 % souhaitent une trêve des forces politiques françaises sur ce sujet.
nuit du dimanche 20 au lundi 21 janvier
Des indépendantistes kanaks ont saboté la mine de nickel de Thio. Un important matériel a été détruit. Malgré les promesses du président Mitterrand, le redémarrage de la mine n’est pas envisageable avant trois semaines.
lundi 21 janvier
Réagissant à la visite du président Mitterrand, le président du gouvernement local Dick Ukeiwé affirme être convaincu que ce voyage en Nouvelle-Calédonie est « un coup destiné à abuser l’opinion publique ». Il a par ailleurs dénoncé Jean-Marie Tjibaou comme le simple chef d’une « faction minoritaire » qui cherche à imposer son pouvoir par la violence. Dans la soirée, il a décollé de Nouméa pour Paris avec deux de ses ministres. De son côté, des représentants du LKS, qui s’est désolidarisé du FLNKS, ont fait part de leur intention de se rendre également en métropole à la fin de la semaine. Recevant à Canberra Jean-Marie Tjibaou, le gouvernement australien a déclaré combien le plan Pisani leur paraissait « positif » pour l’avenir du Territoire. Le leader indépendantiste a de son côté rappelé les aspirations des Kanaks. Tenant sa première conférence de presse depuis mai 1981, l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing a déclaré soutenir la solution française pour la Nouvelle-Calédonie : se référant à l’Algérie et aux accords d’Evian, il a affirmé qu’il n’y avait aucune garantie possible concernant l’indemnisation ou la présence militaire française.
mercredi 23 janvier
Convocation à l’Assemblée nationale, en fin d’après-midi, du Parlement en session extraordinaire : le vote de la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie, adoptée dans la matinée en Conseil des ministres, a été retardé en raison d’amendements déposés par des sénateurs et d’un recours constitutionnel du RPR, qui s’est radicalisé sur ce sujet. Dès l’ouverture de la séance, la présence dans l’enceinte réservée au public, de Jean-Marie Tjibaou (invité par le PS), a causé un incident : le président du groupe RPR Claude Labbé a demandé un rappel au règlement en refusant de siéger tant que le président du FLNKS serait présent. Son départ a permis la reprise des débats. Au cours de la journée, les leaders de l’opposition avaient déjà refusé de le recevoir à sa demande. M. Tjibaou avait déclaré que même si le résultat d’un référendum était négatif concernant les revendications des indépendantistes, leur combat se poursuivra. Dans le territoire, un commando du FLNKS a saboté les équipements de la mine de nickel de Kouaoua.
nuit du mercredi 23 au jeudi 24 janvier
L’Assemblée nationale a adopté la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie jusqu’au 30 juin 1985. Seuls les socialistes ont voté pour. L’opposition est divisée sur je sujet : le RPR a voté contre et l’UDF s’est abstenue.
jeudi 24 janvier
A son tour le Sénat a débattu de la loi sur la prorogation de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie. Des amendements sur la réduction de six à un mois de cet état d’urgence ont été présentés par l’opposition majoritaire. Le président du territoire, Dick Ukweiwé, est intervenu à la tribune pour s’en prendre à Edgard Pisani et mettre en garde contre les effets pervers d’une telle prorogation. Le groupe RPR du Sénat a annoncé son intention de présenter un recours devant le Conseil constitutionnel.
L’Assemblée territoriale de Polynésie française a habilité le président du gouvernement polynésien à signer à Nouméa une « alliance » avec la Nouvelle-Calédonie.
nuit du jeudi 24 au vendredi 25 janvier
Le Sénat a voté la prorogation de l’état d’urgence, mais le texte a été profondément amendé avec la réduction de six à un mois de la durée durant laquelle l’île sera soumise à cette situation. L’opposition, désunie à l’Assemblée nationale, a refait son unité au Sénat.
vendredi 25 janvier
En vertu de l’article 61 de la Constitution, la loi prolongeant l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie est déférée par l’opposition au Conseil constitutionnel, avant sa promulgation. La loi est déclarée conforme et promulguée le jour même.
lundi 28 janvier
Six militants du FLNKS ont été inculpés et incarcérés pour les récents sabotages des mines de nickel, notamment à Kouaoua. Dans le même temps, une quinzaine d’employés ont commencé à nettoyer les locaux et à déblayer les obstacles dans la mine de Thio, fermée par les indépendantistes depuis plus de deux mois. Les 250 ouvriers, en grande partie wallisiens et tahitiens, avaient trouvé refuge à Nouméa avec leurs familles. Invité de l’émission L’Heure de vérité sur Antenne 2, le président du RPR Jacques Chirac a réaffirmé son soutien au statut évolutif de la Nouvelle-Calédonie proposé au Sénat par Dick Ukeiwé. A Paris, Jean-Marie Le Pen, qui tenait un meeting dans la soirée à l’Espace Ballard, a accusé le gouvernement de commettre un « complot monstrueux » contre la France.
mardi 29 janvier
Avant de quitter la France pour retourner en Nouvelle-Calédonie, le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a réuni dans la soirée 3 000 de ses partisans à Paris, à l’Espace Balard. Le chef indépendantiste calédonien y a reçu le soutien d’une cinquantaine de partis politiques (Mouvement pour la Guadeloupe indépendante, Union démocratique bretonne, etc.), de syndicats et d’associations.
mercredi 30 janvier
Edgard Pisani a remis au gouvernement une première version, intérimaire, de son plan annoncé le 7 janvier dernier. Celui-ci n’est pas définitif, le haut commissaire pour la Nouvelle-Calédonie comptant poursuivre ses entretiens pendant encore un mois à Nouméa. De son côté Dick Ukeiwé, président du gouvernement local, a remis en avant son propre projet pour le territoire, fondé sur l’autonomie, tout en demandant le retour de M. Pisani en métropole. Selon un sondage réalisé dans le Territoire par le magazine Paris-Match, si un référendum était organisé, 66 % des Néo-Calédoniens voteraient pour un maintien dans la République française contre 25 % pour l’indépendance-association.
jeudi 31 janvier
Le gouvernement de Jakarta a annoncé qu’il allait un délégué officiel en Nouvelle-Calédonie afin de prendre contact avec la communauté indonésienne qui vit dans l’île.
dimanche 3 février
Edgard Pisani s’est longuement entretenu en Nouvelle-Calédonie avec le chef du FLNKS, Jean-Marie Tjibaou.
lundi 4 février
Le haut commissaire au territoire Edgard Pisani s’est rendu en brousse, où il a notamment rencontré des éleveurs caldoches.
samedi 9 février
Le FLNKS hausse et le ton à l’occasion de son congrès tenu à huis-clos à Nakéty. Les indépendantistes se sont prononcés contre le projet Pisani de référendum et d’indépendance-association. L’action de l’organisation est restructurée : renforcement des pouvoirs du bureau politique du FLNKS. Celui-ci décide que les instances de base du Front seront les 34 comités de lutte unitaires installés dans chaque commune afin d’organiser les nouvelles actions sur le terrain et les occupations de terre. Il désigne également trente-sept députés de la Convention nationale, le « Parlement » indépendantiste chargé d'élire le gouvernement provisoire de Kanaky et d’adopter son budget. Par ailleurs Léopold Jorédié a été désigné pour succéder à Eloi Machoro en tant que ministre de la Sécurité. Enfin, le bureau politique du FLNKS appelle au boycott de l’ « école coloniale » et à la création d’écoles populaires kanakes dans les zones contrôlées par le FLNKS. A Nouméa, le président du Territoire Dick Ukeiwé a demandé le rappel en France d’Egard Pisani : il demande au président Mitterrand de nommer un autre représentant de l’Etat « susceptible de restaurer la confiance et le dialogue ».
nuit du dimanche 10 au lundi 11 février
Pour la première fois le couvre-feu n’a pas été respecté à Nouméa : plusieurs milliers de caldoches ont manifesté dans la nuit à Nouméa contre le plan Pisani, contre l’indépendance et contre l’état d’urgence à l’appel du député RPCR Jacques Lafleur. Le défilé, qui s’est déroulé sans incident, a duré trois heures. Le déploiement des forces de l’ordre a été discret.
lundi 11 février
Le Premier ministre Laurent Fabius a appelé au dialogue les adversaires de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie. Il en a profité pour renouveler sa confiance en Edgard Pisani pour la poursuite de sa mission de négociations.
mardi 12 février
Journée calme en Nouvelle-Calédonie, où le RPCR a demandé à la population de respecter à nouveau les règles du couvre-feu. Le président du Territoire, Dick Ukeiwé, a annoncé ne pas exclure une rencontre avec Edgard Pisani. Ce dernier a lancé un nouvel « appel à la raison » aux deux communautés.
mercredi 13 février
Tous deux proches du RPR, les présidents des territoires de Nouvelle-Calédonie, Dick Ukeiwé, et de Polynésie-Française, Gaston Flosse, ont signé à Nouméa une alliance de solidarité dirigée contre la politique du gouvernement central.
dimanche 17 février
De violents affrontements ont opposés indépendantistes, caldoches et gendarmes lors d’un « pique-nique » à Thio : les gendarmes sont accusés d’avoir laissé passer un grand nombre de caldoches cherchant à en découdre et d’avoir violemment chargé le « comité d’accueil » kanak de la tribu Saint-Philippo, qui déplore 11 blessés. Un fossé existerait entre les hommes sur le terrain d’une part, l’état-major de Nouméa et Edgard Pisani d’autre part : l’absence d’informations aurait entraîné des dérapages de la part des forces de l’ordre.
lundi 18 février
Une maison a été brûlée près de la tribu kanake de Saint-Philippo. A Paris, le porte-parole du Parti socialiste Jean-Pierre Destrade a demandé l’ouverture d’une enquête « très serrée » sur les incidents de la veille à Thio. Tout en dénonçant l’attitude des autorités, le FLNKS a annoncé ne pas rompre les négociations avec Edgard Pisani.
mardi 19 février
Edgard Pisani a effectué une visite surprise à Thio, où il a été reçu fraîchement par les Kanaks. Par ailleurs, l’un des auteurs présumés du sabotage de la mine de Thio, un caldoche, a été arrêté et écroué, et un autre, en fuite, a été identifié.
mercredi 20 février
Le capitaine de gendarmerie de La Foa impliqué dans les violences entre forces de l’ordre, caldoches et indépendantistes kanaks lors du « pique-nique » de Thio a été rappelé en urgence en métropole, mais sans être sanctionné. Près de Thio, une voiture a été la cible de jets de pierre de la part de membres de la tribu Saint-Philippo : victime d’une fracture du crâne, une fillette a du être héliportée en urgence à Nouméa. L’enfant était membre de la même tribu mais les agresseurs ne l’ont pas vu et ont juste constaté que l’automobile était conduite par une femme blanche…
jeudi 21 février
Les premières sanctions ont été prises par Edgard Pisani dans le cadre de l’enquête sur les récents incidents de Thio : cinq interdictions de séjour en Nouvelle-Calédonie pour troubles à l’ordre public ont été prononcées contre des militants d’extrême-droite, dont le chef du Front calédonien Claude Sarran. Sommés de quitter le territoire le 25 février, ils refusent tous les cinq de partir. Le major-général de la gendarmerie française vient par ailleurs d’arriver en Nouvelle-Calédonie.
vendredi 22 février
Le Premier ministre a fait savoir qu’il était hors de question que le gouvernement revienne sur les interdictions de séjour prises par Edgard Pisani à l’encontre de cinq militants d’extrême-droite. Laurent Fabius n’a pas l’intention de recevoir le député RPCR Jacques Lafleur à ce sujet.
samedi 23 février
Le président de l’Assemblée de Nouvelle-Calédonie Dick Ukeiwé a été empêché d’atterrir dans son île natale de Lifou : débordant le cordon d’une douzaine de gendarmes, 200 indépendantistes avaient envahi la piste de l’aérodrome local pour empêcher son avion de se poser. C’est la première fois depuis le début des événements que M. Ukeiwé tentait de retourner à Lifou, où sa maison a été incendiée à deux reprises. Par ailleurs, les cinq anti-indépendantistes qui doivent quitter le territoire le 25 février ont disparu de leurs domiciles, bien décidés à rester dans le territoire.
dimanche 24 février
Cachés quelque part dans l’île, les cinq militants d’extrême-droite menacés d’expulsion en Nouvelle-Calédonie ont réaffirmé dans un communiqué leur intention de rester sur le territoire ; ils demandent également à la population de les soutenir dans le sang-froid. Le député RPCR Jacques Lafleur a appelé à un défilé « de soutien » et « pour la liberté », dans le calme, suivie d’une journée « île morte » le 26 février, en dépit de l’état d’urgence qui interdit ce genre de manifestation.
lundi 25 février
A la veille d’une grande manifestation des anti-indépendantistes, les cinq « expulsés » n’ont pas quitté le territoire. Ils ont disparu de leur domicile depuis deux jours et se trouvent désormais en infraction avec la loi.
mardi 26 février
Entre 30 000 et 35 000 anti-indépendantistes ont défié le couvre-feu et l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie en participant à un « défilé de la liberté » organisé par le RPCR dans les rues de Nouméa. Jacques Lafleur a appelé à l’organisation d’un référendum d’ici un mois sur la base des propositions de Dick Ukeiwé. Le secrétaire d’Etat Georges Lemoine a réagi en déclarant que celui-ci ne pourrait être organisé avant la fin du mois de septembre en raison d’ « obstacles juridiques ».
jeudi 28 février
A la veille de la rentrée scolaire, le FLNKS a appelé au boycott des écoles. Les indépendantistes ont également annoncé leur annoncé d’ouvrir leurs propres établissements scolaires kanaks qui feront une grande place à l’enseignement de la langue et de la culture mélanésienne : fini « la neige » et « nos ancêtres les Gaulois » a déclaré un responsable du mouvement.
vendredi 1er mars
La rentrée scolaire en Nouvelle-Calédonie s’est déroulée dans le calme à Nouméa et dans la plus grande partie de l’île. Elle n’a cependant pas eu lieu à Thio. La consigne de boycott lancée par le FLNKS n’a été suivie que par 50 à 60 % des élèves mélanésiens, essentiellement en brousse. Par ailleurs, l’un des cinq expulsés s’est présenté de son plein gré au haut-commissariat, d’où il est ressorti libre : il a été autorisé à demeurer sur l’île à condition de se présenter deux fois par semaine aux autorités.
samedi 2 mars
Les 93 militants indépendantistes détenus à la prison de Nouméa ont entamé une grève de la faim : ils réclament le statut de prisonniers politiques et l’amélioration de leurs conditions de détention.
lundi 4 mars
La situation a dégénéré en Nouvelle-Calédonie : les gendarmes ont lancé une vaste opération d’intervention dans trois tribus kanakes de la localité de Thio afin d’y rétablir l’ordre et de procéder à l’interpellation des meurtriers du jeune Yves Thual. Plus de 400 gendarmes ont participé à cette action. Ils ont été reçus par des jets de pierre, auxquels ils ont répondu par des tirs de gaz lacrymogène. Quelques personnes ont été légèrement blessées et huit autres ont été arrêtées. Dénonçant cette opération, le FLKS a appelé à une journée du peuple kanak pour le 8 mars afin de soutenir les 93 détenus en grève de la faim.
mercredi 6 mars
En Nouvelle-Calédonie, annonce de la rencontre il y a quelques jours du chef du FLNKS, Jean-Marie Tjibaou, avec Edgard Pisani. Cette première depuis plusieurs semaines a été tenue secrète plusieurs jours. Par contre, les indépendantistes d’Ouvéa ont refusé de recevoir aujourd’hui le délégué du gouvernement. D’autre part, la gendarmerie est intervenue une deuxième fois à Thio, où des militants indépendantistes kanaks ont incendié des camions : une centaine de gendarmes mobiles ont investi la tribu Saint-Philippo 2. Enfin, à la suite d’une enquête commune franco-australienne, quatre Français ont été arrêtés en Australie pour avoir tenté de faire entrer une importante quantité d’armes sur le territoire néo-calédonien.
vendredi 8 mars
Pour la première fois depuis le début des troubles dans l’île, le FLNKS a organisé une manifestation dans les rues de Nouméa : environ 2 000 militants kanaks ont ainsi protesté contre l’incarcération de 93 indépendantistes. La fraction la plus dure du mouvement a commis diverses violences à travers toute l’île : dans le nord du territoire, un major de gendarmerie a été tué à coups de sabre à Pouébo, alors qu’il terminait avec ses collègues de déblayer un barrage établi par quatre-vingts Kanaks. Le meurtrier est parvenu à s’enfuir. L’estimant incapable de rétablir l’ordre, Dick Ukeiwé a déclaré qu’Edgard Pisani avait totalement échoué dans sa mission. Intervenant à la télévision, le président du gouvernement de l’archipel a ensuite demandé aux militants indépendantistes de déposer les armes.
vendredi 22 mars
Un mois après un premier refus de la part des responsables kanaks locaux, Edgard Pisani s’est rendu à Thio pour rendre visite à la tribu d’Eloi Machoro, le leader indépendantiste tué il y a 70 jours. Le haut-commissaire délégué du gouvernement a déclaré aux militants de base du FLNKS qu’il assumait la responsabilité de l’opération au cours de laquelle leur chef avait trouvé la mort tout en affirmant que son intention était uniquement de l’arrêter. Il a jouté qu’il s’inclinait devant la dépouilles de son adversaire. Le RPR a aussitôt protesté contre ces déclarations qui confirment que le pouvoir s’obstine à « traiter avec ceux qui se comportent en ennemis de la France et de la République ».
lundi 25 mars
A quelques jours de remettre son rapport au président Mitterrand, Edgard Pisani a tenu sa dernière conférence de presse à Nouméa. Il a averti que si le gouvernement rejetait des aspects substantiels de son projet, il lui demanderait d’en tirer les conséquences. Avant de quitter la Nouvelle-Calédonie il s’est adressé de façon originale aux deux communautés en publiant dans la presse deux lettres différentes adressées à un jeune Kanak et à un jeune Caldoche, les appelant l’un et l’autre à la modération. Il y défend une indépendance multiraciale en association avec la France.
mardi 26 mars
A peine Edgard Pisani avait-il quitté la Nouvelle-Calédonie pour rentrer à Paris, après quatre mois de mission, que Dick Ukeiwé profitait du jour d’ouverture de l’Assemblée territoriale pour présenter à Nouméa son contre-plan pour l’avenir de l’archipel. Tout en prévoyant une autonomie très poussée, celui-ci prévoit de séparer en deux parties, dans le sens de la longueur, un territoire qui demeurerait au sein de la République française. Chacune de ces deux régions disposerait d’une assemblée élue au suffrage universel. La partie occidentale, qui comprend Nouméa et la plus grande partie des terres exploitables, abriterait 73 % de la population totale, mais seulement 20 % de Mélanésiens, l’orientale, montagneuse, aride et pauvre, l’inverse. Ce plan a d’ores et déjà été rejeté par les indépendantistes kanaks représentés à l’Assemblée.
jeudi 28 mars
Edgard Pisani a remis au Premier ministre Laurent Fabius puis au président François Mitterrand son rapport sur la situation de la Nouvelle-Calédonie. Après quatre mois de mission dans l’archipel, il vient défendre en métropole son plan indépendance-association. La balle est désormais dans le camp du gouvernement, qui compte bien prendre son temps. De son côté, Dick Ukeiwé a fait savoir qu’il se rendrait également bientôt dans la capitale pour y défendre son propre plan et pour y rencontrer M. Pisani, ce qu’il avait toujours refusé de faire à Nouméa.
mardi 2 avril
Le président du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie a donné une conférence de presse à Paris, au Sénat : accusant le gouvernement français d’avoir opté pour une « stratégie du pourrissement » et reprochant à Edgard Pisani d’ « aggraver la situation » en préconisant une administration directe du territoire par l’Etat, Dick Ukeiwé réclame qu’un référendum d’autodétermination soit organisé le plus rapidement possible dans l’archipel afin de permettre la mise en place d’une plus grande autonomie. Dans l’archipel, trois Mélanésiens ont été agressés par des indépendantistes dans l’île de Lifou et l’école locale a été saccagée.
vendredi 5 avril
Ouverture au Moule, en Guadeloupe, de la « Conférence des dernières colonies françaises », qui réunit des représentants des indépendantistes de presque tous les départements et territoires d’outre-mer (à l’exception de ceux de la Polynésie française). Cette réunion est vivement contestée par l’opposition de droite qui estime que l’autoriser c’est encourager les thèses indépendantistes.
dimanche 7 avril
Clôture du sommet des indépendantistes en Guadeloupe : condamnant l’action du gouvernement français dans les départements et territoires d’Outre-Mer, ils appellent à la fin du colonialisme français. Afin de maintenir le contact entre eux, ils ont décidé de mettre en place une structure de coordination et d’information.
Deux automobilistes ont été grièvement blessés près de Bourail par des pierres jetées par de jeunes Mélanésiens.
lundi 8 avril
A Nedivin, sur la côte orientale de la Nouvelle-Calédonie, une enseignante de 46 ans d’origine européenne, Simone Heurtaux, a été tuée par des jets de pierre sur sa voiture. Touchée à la tête, elle a perdu le contrôle de son véhicule et a trouvé la mort dans l’accident. Deux jeunes Kanaks du village voisin ont été arrêtés par les gendarmes mobiles.
jeudi 11 avril
Trois jours après l’assassinat de Simone Heurtaux, les syndicats de la fonction publique (enseignants et fonctionnaires) ont lancé en Nouvelle-Calédonie un mouvement de grève de quatre jours. Environ 2 000 personnes ont manifesté dans les rues de Nouméa pour réclamer que « la sécurité des travailleurs soit garantie ». Ils demandent également que les écoles kanakes ouvertes par les indépendantistes soient déclarées illégales.
samedi 13 avril
Retiré depuis deux mois dans son village, le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a tenu une conférence de presse, déclarant qu’il attendait toujours que les Kanaks obtiennent, le plus vite possible, l’indépendance. Il a également indiqué qu’il retournera bientôt à Paris.
mercredi 17 avril
Le leader indépendantiste kanak Jean-Marie Tjibaou est arrivé à Paris pour un voyage de dix jours. Son adversaire Dick Ukeiwé est également présent dans la capitale française.
samedi 20 avril
Le responsable du Front national en Nouvelle-Calédonie, François Néoéré, a organisé une manifestation anti-indépendantiste qui a rassemblé plusieurs milliers de personnes à Nouméa, en présence du maire Roger Laroque et du député Jacques Lafleur. Une délégation du RCP a déposé au haut-commissariat un « plan de paix », véritable attaque d’Edgard Pisani. Les partisans du FLKNS leur ont répondu un peu plus tard dans la matinée. Aucun incident ne s’est produit. A Paris, c’est environ 5 000 indépendantistes qui ont défilé sous la conduite de Jean-Marie Tjibaou et d’Alain Krivine, président de la Ligue communiste révolutionnaire.
dimanche 21 avril
Le ministre de l’Intérieur Pierre Joxe a évoqué la situation en Nouvelle-Calédonie lors de son passage dans l’émission Le Club de la presse d’Europe 1. Il a insisté sur la nécessité de préserver la cohabitation entre les différentes communautés.
lundi 22 avril
Un jeune Mélanésien de 19 ans, accusé d’avoir jeté les pierres ayant tué le 8 avril l’enseignante Simone Heurtaux, s’est livré aux gendarmes de Nouvelle-Calédonie.
jeudi 25 avril
Le Premier ministre Laurent Fabius a dévoilé une série de mesures concertants le futur statut de la Nouvelle-Calédonie : le référendum sur l’autodétermination du territoire est reporté après les élections législatives de 1986 ; l’examen du plan d’ « indépendance-association » conçu par Edgard Pisani doit avoir lieu avant le 31 décembre 1987 ; les modalités d’application du « régime transitoire » sont précisées. Institution de quatre collectivités territoriales, dénommées « régions ». Celles-ci seront dirigées chacune par un « conseil » élu au suffrage universel et à la proportionnelle ; ces quatre conseils formeront un unique « congrès » qui remplacera l’assemblée territoriale actuelle.
vendredi 26 avril
Conférence de Jean-Marie Tjibaou : tout en reconnaissant la prise en compte du peuple kanak en faveur de l’indépendance, le leader du FLNKS condamne le report du référendum prévu à ce sujet.
dimanche 28 avril
Second congrès du Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR, proche du RPR), organisé à Nouméa devant 3 000 personnes : Jacques Lafleur a été réélu à l’unanimité président d’un mouvement qui rejette en bloc le plan du gouvernement. S’estimant persécuté par les socialistes depuis 1981, le parti de Dick Ukeiwé est prêt au dialogue mais également bien décidé à lutter activement contre l’indépendance.
lundi 29 avril
Evoquant une « profonde inégalité démographique » dans leur composition, le Conseil d’Etat a émis des réserves sur les quatre « régions » créées en Nouvelle-Calédonie par le gouvernement français.
Intervenant dans le cadre de l’enquête sur le meurtre du jeune Yves Tual le 11 janvier dernier, la gendarmerie a procédé à l’arrestation de 12 Mélanésiens dans la région de Thio. Toutes les personnes interpellées ont été rapidement relâchées mais ces opérations ont déclenché un mouvement de colère des Kanaks locaux : les employés mélanésiens de la mine de nickel se sont mis en grève pour 24 heures.
mardi 30 avril
Le Conseil des ministres a adopté le projet de loi instaurant un statut transitoire pour la Nouvelle-Calédonie, avec la mise en place en place de quatre « régions » administratives dans le territoire (Nord, Centre et Sud-Est, îles Loyauté et Agglomération de Nouméa) dotées de leur propre assemblée. Le rôle du haut-commissaire sera accru. Le texte a aussitôt été transmis. A Maré, dans les îles Loyauté, des militants du FLNKS séquestrent trente-sept membres du service d’ordre du gouvernement calédonien.
vendredi 3 mai
Mis en place le 12 janvier dernier, le couvre-feu est levé en Nouvelle-Calédonie. L’état d’urgence reste cependant en vigueur.
mercredi 8 mai
Retour de la violence en Nouvelle-Calédonie. Malgré l’interdiction du haut-commissariat et l’annulation de la direction du FLNKS, trois cents militants indépendantistes ont manifesté à Nouméa pour protester contre l’installation d’une base militaire. Ce rassemblement de trois cents militants a provoqué la colère des durs du RPCR. Débordant les forces de l’ordre, des dizaines d’anti-indépendantistes, casqués et armés de barres de fer, sont intervenus, prenant en chasse les Kanaks jusque dans la banlieue. Les affrontements ont duré plusieurs heures dans la capitale du Territoire, où des armes à feu ont également été utilisées. Un jeune Mélanésien de 19 ans, Célestin Zongo, a été tué par une balle de gros calibre et une centaine de personnes ont été blessées, dont dix grièvement. Le couvre-feu a été rétabli à 20 heures. Invoquant un cas de légitime-défense, Dick Ukeiwé exige le rappel en métropole d’Edgard Pisani. Ce dernier met en cause le RPCR, accusé d’avoir souvent violé l’ordre public.
jeudi 9 mai
Le calme est revenu en Nouvelle-Calédonie mais les violences de la veille ont entraîné la démission des sept élus indépendantistes modérés de l’Assemblée territoriale. Ces membres du LKS accusent le RPCR d’avoir organisé une véritable « chasse aux Kanaks ». L’Assemblée se compose désormais uniquement de 35 élus du RPCR. A Nouméa, 300 lycéens, Mélanésiens et Européens confondus, ont organisé une marche à la mémoire de leur camarade tué la veille.
vendredi 10 mai
En ce vendredi, proclamé « jour de deuil » par le FLNKS, des heurts se sont produits à Nouméa devant le lycée La Pérouse : des jets de pierre ont été échangés entre trois cents lycéens européens et wallisiens installés devant l’établissement et 150 mélanésiens retranchés dans l’internat, protégés par un cordon de CRS. Les cours avaient été suspendus après qu’une réunion du SNES ait été interrompue par une vingtaine d’élèves. Des tensions demeurent également en brousse, à Thio et à Lifou, où une patrouille de gendarme a du dégager un barrage indépendantiste à coups de grenades lacrymogène. Le ministre de la Défense est arrivé dans l’archipel à bord du sous-marin d’attaque Le Rubis, qui doit rester dans le territoire entre dix et douze semaines. Charles Hernu a aussitôt visité diverses installations militaires de l’île.
lundi 13 mai
Quatre attentats à l’explosif non revendiqués ont été commis en Nouvelle-Calédonie, dont trois à Nouméa. En métropole, des partis et diverses organisations d’extrême-gauche ont organisé à Paris une manifestation de soutien aux indépendantistes kanaks.
mardi 21 mai
Nommé le 1er décembre 1985, le Haut-Commissaire de la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani est rappelé en métropole pour entrer au gouvernement en tant que ministre chargé du territoire calédonien. Il a pour mission de préparer le futur statut de l’archipel. Le diplomate Fernand Wibeaux est nommé pour le remplacer au poste de Haut-Commissaire. Dick Ukeiwé ne cache pas sa satisfaction du départ d’Edgard Pisani. Tout en ressemblant à une promotion, cette nomination au poste de ministre ressort également comme un aveu de l’usure et de l’incapacité de M. Pisani. Par ailleurs, les élections aux Conseils de région ont été fixées aux 22 et 23 août.
mercredi 22 mai
A peine arrivé à Paris, le nouveau ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani a été reçu à l’Elysée par le président Mitterrand. Dans l’après-midi, il était présent à l’Assemblée nationale, sur le banc des ministres, pour assister à la séance de questions d’actualité.
jeudi 23 mai
L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi sur le statut transitoire de la Nouvelle-Calédonie.
vendredi 24 mai
Reconnu coupable d’ « atteinte à l’intégrité du territoire national », le président du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a été condamné à un an de prison avec sursis et 10 000 francs d’amende par la 17e chambre correctionnel de Paris. La plainte avait été déposée par le gouvernement territorial calédonien. Les avocats de M. Tjibaou et le procureur de la République ont immédiatement fait appel.
samedi 25 mai
Ouverture à Hienghène, dans le nord de Grande-Terre, du troisième congrès du FLNKS. Adversaires et partisans de la ligne prônée par Jean-Marie Tjibaou s’affrontent.
dimanche 26 mai
Suite et fin du congrès du FLNKS à Hienghène : à l’issue d’âpres discussions, les extrêmes du mouvement ont fini par accepter la position de compromis et la ligne politique de Jean-Marie Tjibaou. Tout en se prononçant contre l’idée générale du projet Fabius, les indépendantistes présenteront des candidats aux élections aux conseils de région du mois d’août. Les délégués ont refusé l’installation de bases militaires dans l’archipel.
mercredi 29 mai
A l’Assemblée nationale, les députés ont commencé à discuter du projet de loi sur le futur statut de la Nouvelle-Calédonie.
jeudi 30 mai
Dans la soirée, les députés ont voté les articles du projet de référendum et d’indépendance-association de la Nouvelle-Calédonie.
vendredi 31 mai
L’Assemblée territoriale de Nouvelle-Calédonie a donné un avis consultatif défavorable au projet de référendum et d’indépendance-association du territoire proposé par Edgard Pisani en janvier dernier. Par ailleurs, Fernand Wibaux succède officiellement à Edgard Pisani comme haut-commissaire de l’archipel.
mardi 4 juin
A Paris, les députés ont adopté le projet de loi sur l’évolution de la Nouvelle-Calédonie.
samedi 8 juin
Des militants du FLNKS ont manifesté en Nouvelle-Calédonie contre l’établissement d’une base militaire stratégique à Nouméa.
vendredi 14 juin
Le ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie, Edgard Pisani, a décrété la levée du couvre-feu dans le territoire.
jeudi 20 juin
Le président du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie, Dick Ukeiwé, a déclaré à Nancy qu’il était opposé au nouveau statut de l’archipel. Il demande, en cas de victoire de l’opposition aux législatives de 1986, l’organisation d’un référendum sur l’autodétermination.
dimanche 30 juin
L’état d’urgence, proclamée le 12 janvier par Edgard Pisani a été levée en Nouvelle-Calédonie.
mardi 23 juillet
Ouverture au Sénat du débat sur le futur statut de la Nouvelle-Calédonie. Dans leur majorité, les élus disent « oui » aux élections et à la réforme (mais avec des amendements) mais « non » à l’indépendance et à l’état d’urgence.
vendredi 26 juillet
Les députés ont définitivement adopté le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie.
lundi 29 juillet
Les gendarmes venus arrêter un jeune Mélanésien de dix-neuf ans soupçonné du meurtre d’Yves Thual en janvier dernier en ont été empêchés dans la soirée par la tribu Saint-Philippo II. Le pont menant de la mine de Thio à l’embarcadère du chargement de nickel a été bloqué.
mardi 30 juillet
Regain de tension en Nouvelle-Calédonie : afin de protéger l’un de ses membres, soupçonné du meurtre d’Yves Thual, une centaine de membres de tribu Saint-Philippo II paralysent le village de Thio. Jets de pierre répondent aux grenades lacrymogènes des gendarmes et les tirs de fusils de chasse aux rafales de mitraillettes. Impliqués dans l’opération, trois escadrons de gendarmerie, quatre blindés et six hélicoptères sont parvenus à lever les barrages. Six personnes ont été blessées. Le FLNKS a appelé à la mobilisation tous les comités de lutte de la Kanakie.
nuit du mardi 30 au mercredi 31 juillet
Plusieurs maisons ont été incendiées par des inconnus à Thio. Une trentaine de personnes ont été contraints de se réfugier dans la gendarmerie.
jeudi 1er août
Thio reste coupée du reste de la Nouvelle-Calédonie par les barrages. Mais des négociations semblent avoir lieu entre indépendantistes et autorités.
lundi 5 août
Des représentants des indépendantistes et des Caldoches se sont rencontrés à la mairie de Thio : un accord a été conclu sur le principe de la reprise de l’activité à la mine de nickel locale.
lundi 6 août
L’Australie, les Fidji, les îles Cook, Kiribati, Niue, la Nouvelle-Zélande, les Samoa et Tuvalu ont signé le traité de Rarotonga (îles Cook) sur la création d’une zone d’exclusion des armes nucléaires dans le Pacifique sud. Les grandes puissances occidentales de la région (Etats-Unis, France, Royaume-Uni) devront être consultées pour voir leurs territoires réciproques inclus dans ce traité. Hostiles aux expériences nucléaires françaises de Mururoa, les Etats océaniens sont également favorables à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie.
Conformément à l’accord conclu la veille, le travail a repris à la mine de nickel de Thio.
mercredi 7 août
Adoptant les méthodes de lutte des Kanaks, des anti-indépendantistes ont installé un barrage sur un pont à Témala, dans le nord de la Nouvelle-Calédonie.
jeudi 8 août
Le Conseil constitutionnel a émis des réserves sur la loi relative à l'évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Le point qui pose problème est l’article concernant le nombre de conseillers dans les quatre conseils de régions, et plus particulier dans celui de la région de Nouméa : l’inégalité de représentation serait trop grande. Cet article ayant été annulé, les dates des élections à ces conseils, prévues en septembre, sont reportées.
vendredi 9 août
Suite aux réserves émises la veille par le Conseil constitutionnel, le président Mitterrand a convoqué le Parlement en session extraordinaire pour le 12 août.
samedi 10 août
Divers mouvements indépendantistes (FNKS, Basques français et espagnols, irlandais, guadeloupéens, arméniens) participent aux Journées internationales de Corte qui s’ouvrent ce jour en Haute-Corse. Elles sont organisées par le Mouvement corse pour l’autodétermination (MCA).
lundi 12 août
Début à 15 heures, dans une ambiance tendue, de la session extraordinaire de l’Assemblée nationale. 160 députés ont interrompus leurs vacances pour réexaminer la loi concernant l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Plusieurs rappels au règlement ont été nécessaires pour obtenir le calme dans l’Assemblée. L’ancien président Valéry Giscard d’Estaing et Michel Debré ont déclaré que la procédure employée par le chef de l’Etat et le gouvernement pour faire adopter le texte était non constitutionnelle.
nuit du lundi 12 au mardi 13 août
Les députés ont adopté un amendement à la loi sur l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. La région de Nouméa comptera 21 conseillers au lieu des 18 prévus initialement. L’opposition réclamait encore plus d’élus. Le Parti communiste a voté contre. Le texte doit maintenant être étudié par le Sénat.
mardi 13 août
Réunis de façon extraordinaire, comme les députés, les sénateurs ont reporté au 19 août leur examen du texte sur l’évolution du statut néo-calédonien. La faute aux accusations portées la veille par Giscard d’Estaing et Debré sur la caractère non constitutionnel de la méthode utilisée par le gouvernement et le chef de l’Etat. Il est désormais évident que l’opposition saisira le Conseil constitutionnel à ce sujet.
nuit du jeudi 15 au vendredi 16 août
La police a arrêté à Nouméa neuf personnes qui affirment appartenir à un service de sécurité du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie.
lundi 19 août
Ouverture au Sénat du débat sur la Nouvelle-Calédonie. Avant même l’ouverture des discussions, l’opposition a annoncé qu’elle déposera un nouveau recours devant le Conseil constitutionnel pour contester la procédure utilisée par le président de la République.
mardi 20 août
Après un débat fort houleux, les sénateurs ont voté la loi relative à l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie. Le texte, revenu aussitôt à l’Assemblée nationale, a été adopté définitivement dans la soirée par les députés, et sans les amendements déposés par l’opposition : le nombre d’élus de la région de Nouméa demeure à 21 et non au moins 25 comme le souhaitait la droite. La procédure utilisée par le président de la République doit maintenant être étudiée par le Conseil constitutionnel.
jeudi 22 août
Après une visite mouvementée à Thio, François Léotard est de retour à Nouméa. Prenant la parole devant plusieurs milliers d’anti-indépendantistes, le secrétaire général du Parti républicain, accompagné de Jacques Médecin et de Roger Chinaud, a lancé un double avertissement, à certains ministres australiens et à certains fonctionnaires « politisés ». Il a déclaré que la nouvelle majorité qui arrivera au pouvoir dans quelques mois saura se souvenir de certaines déclarations prononcées en Australie sur la situation intérieure de la France. Le gouvernement parle d’un chantage menaçant honteux adressé aux fonctionnaires de l’île. M. Léotard affirme également que les forces de police et de gendarmerie ont reçu l’ordre de ne pas intervenir en cas de violences.
vendredi 23 août
Le Conseil constitutionnel a adressé un revers à l’opposition en rejetant ses deux recours déposés, d’une part contre la procédure utilisée par le président de la République (recours à l’article 10) concernant l’adoption de la nouvelle loi relative à l’évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie et d’autre part sur le nombre de conseillers régionaux. Le statut Fabius-Pisani est officiellement confirmé : création de quatre régions (Sud, Centre, Nord et Iles), chacune disposant d’un conseil élu au suffrage universel à la proportionnelle de liste et formant un Congrès du Territoire (qui remplace l’Assemblée territoriale). Maintenu en place, le Haut-Commissaire sera désormais secondé par un Conseil exécutif dirigé par le président du Congrès et composé des quatre présidents de Région. Par ailleurs, un conseil consultatif coutumier sera créé dans chaque région.
lundi 26 août
Réagissant aux propos polémiques de François Léotard, les ministres de la Défense et de l’Intérieur, Charles Hernu et Pierre Joxe, ont demandé au secrétaire général du Parti républicain de produire dans les délais les plus brefs les preuves de ses accusations portées contre les fonctionnaires et magistrats de Nouvelle-Calédonie. Ils ont menacé de saisir la justice pour « injures, diffamation et outrages ».
mercredi 28 août
Le conseil des ministres a confirmé l’organisation des élections régionales en Nouvelle-Calédonie pour le 29 septembre. Le ministre chargé du territoire, Edgar Pisani, a déclaré que des mesures spéciales seront prises à cette occasion pour assurer le bon déroulement du scrutin (bureaux de vote présidés par des magistrats, etc.). Par ailleurs, les sections de l’USM et du Syndicat de la magistrature de Nouméa ont à leur tour exigé de François Léotard qu’il présente les preuves de ses accusations lancées il y a quelques jours contre les fonctionnaires et les magistrats de l’île.
jeudi 29 août
Fin officielle des fonctions du gouvernement territorial de Nouvelle-Calédonie.
jeudi 5 septembre
Regain de tension sur la côte est de la Nouvelle-Calédonie : des barrages ont été dressés par des indépendantistes de Ponerihouen qui réclament l’expulsion d’une famille dont l’un des fils a grièvement blessé une jeune Kanake la veille.
samedi 7 septembre
Les derniers barrages installés entre Ponerihouen et Houaïlou ont été levés par les gendarmes. Mais l’ultimatum des indépendantistes locaux demeure.
mercredi 11 septembre
Le FLNKS est dépassé par sa base en Nouvelle-Calédonie : agressions, incendies criminels et caillassages (jets de pierres) se succèdent dans l’île.
jeudi 12 septembre
Le gouvernement a publié le décret sur le renforcement de la base stratégique de Nouméa. Il est également prévu d’agrandir la piste aérienne.
samedi 14 septembre
Gisèle Maohi a été élue Miss Nouvelle-Calédonie.
lundi 16 septembre
En visite en Nouvelle-Calédonie, le secrétaire général du RPR Jacques Toubon a présenté à Nouméa les propositions de son parti concernant l’avenir du territoire. Si l’opposition remporte les élections législatives de 1986 elle compte notamment organiser un référendum sur le maintien de l’archipel au sein de la République française.
dimanche 22 septembre
Lancement de la première radio indépendantiste de Nouméa, Radio Canaque.
mardi 24 septembre
Arrivées en série en Nouvelle-Calédonie à quatre jours des élections locales : le président du RPR Jacques Chirac et le secrétaire national du Parti républicain François Léotard ont été rejoints quelques heures plus tard par Jean-Marie Le Pen, ce dernier ayant bien soin d’éviter de prendre le même avion que les deux autres responsables de l’opposition. Accueilli par un millier de partisans, le président du Front national a reçu une lettre de Dick Ukeiwé lui demandant de retirer son candidat dans la région Centre afin d’éviter que celle-ci ne tombe aux mains des indépendantistes.
mercredi 25 septembre
Après un déplacement à Bourail, Jacques Chirac et François Léotard ont tenu à Nouméa, sur la place des Cocotiers, un meeting commun « bleu, blanc, rouge » devant plus de 7 000 personnes. Dénonçant le projet d'indépendance-association, jugé « malhonnête et indigne », le président du RPR s’est prononcé en faveur d’un référendum d’autodétermination et de la mise en place d’une aide exceptionnelle pour favoriser le développement du territoire. S’adressant aux indépendantistes, il a rajouté : « Vous êtes chez vous mais nous sommes aussi chez nous car nous avons tous ici notre place dans un destin commun : Mélanésiens, Caldoches venus de la vieille Europe mais aussi Wallisiens, Tahitiens ou Asiatiques. Oui, nous sommes chez nous car nous sommes en France ! ».
nuit du mercredi 25 au jeudi 26 septembre
A 1 heure du matin (heure locale), un attentat à la bombe a frappé à Nouméa l’Office de développement de l'intérieur et des îles (ODIL), dirigé par un militant du FLNKS. Tout le quatrième étage d’un immeuble a été soufflé.
jeudi 26 septembre
Campagne électorale en Nouvelle-Calédonie : le leader du FLNKS Jean-Marie Tjibaou a dénoncé le déploiement des forces de l’opposition venues de métropole. Par ailleurs, le Front national a accepté de retirer sa liste de la région centre au profit du RPCR.
dimanche 29 septembre
Elections régionales en Nouvelle-Calédonie : bien que n’ayant obtenu que 39,15 % des voix (avec ses alliés), le FNLKS crée la surprise et profite du découpage pour remporter trois régions : Jean-Marie Tjibaou dans le Nord avec 6 sièges, contre 2 au RPCR et 1 au RPC ; Léopold Jorédié dans le Centre avec 5 élus contre 4 au RPCR ; Yeivéné Yeiwéné dans les îles Loyauté avec 4 sièges, contre 2 au RPCR et 1 au LKS. Avec 60,585 % des suffrages, les anti-indépendantistes ne gagnent que la région Sud (Jean Lègues, avec 17 élus RPCR, contre 3 au Front national et 1 seul au FLNKS). Le RPCR peut cependant se consoler en obtenant, comme prévu, la majorité au Congrès (26 élus RPCR, 16 FLNKS, 3 FN et 1 LKS), dont la présidence doit revenir à Dick Ukeiwé. Le taux de participation était très important : près de 80 %. Le scrutin s’est déroulé dans le calme, sans aucun incident signalé. Déçus par la perte de la région Centre, MM. Ukeiwé, Lafleur et Pons ont immédiatement dénoncé le statut Pisani et plus particulièrement le découpage des régions. Celui-ci est également très attaqué en métropole par l’opposition de droite.
lundi 30 septembre
Première réaction de Jacques Chirac après les élections de Nouvelle-Calédonie : le président du RPR se déclare non surpris par les résultats et prévient qu’en cas de victoire de l’opposition aux législatives de 1986 il y aura immédiatement un scrutin d’autodétermination dans l’archipel suivi d’un nouveau statut donnant une large autonomie au territoire.
vendredi 4 octobre
Changement de stratégie au sein du FLNKS : le nouveau héros des indépendantistes, Léopold Jorédié, a accepté de rencontrer Dick Ukeiwé afin de gérer au mieux les trois régions où ils sont majoritaires.
lundi 7 octobre
Réunion du premier congrès de Nouvelle-Calédonie, issu des élections du 29 septembre : 29 anti-indépendantistes (26 RPCR et 3 FN) font face à 18 indépendantistes (16 FLNKS et 1 LKS) dans une ambiance tendue. Comme prévu, le RPCR Dick Ukeiwé a été élu président : il a appelé la population du territoire à une « résistance légitime ».
jeudi 10 octobre
Dick Ukeiwé a déposé un recours devant le Conseil d’Etat : il conteste les résultats des élections du 29 septembre en raison, affirme-t-il, de multiples fraudes observées dans la région Centre.
nuit du dimanche 20 au lundi 21 octobre
De violents affrontements entre Mélanésiens ont fait des dizaines de blessés sur l’île de Lifou, dans l’archipel des Loyauté.
mercredi 13 novembre
Signature des premières ordonnances régissant les nouveaux rapports entre le gouvernement et la Nouvelle-Calédonie. Elle concerne le nouveau régime foncier et l’éducation. Le ministre Edgard Pisani considère désormais que son ministère n’a plus raison d’être.
vendredi 15 novembre
Remaniement ministériel : le ministère de la Nouvelle-Calédonie est supprimé et son titulaire, Edgard Pisani, est nommé chargé de mission à l’Elysée.
lundi 18 novembre
Décès en Nouvelle-Calédonie de Roger Laroque. Membre fondateur du RPCR, il était maire de Nouméa depuis 1953. Son premier adjoint, Jean Lèques, assure l’intérim dans l’attente de nouvelles élections.
jeudi 21 novembre
Arrestation en Nouvelle-Calédonie de l’assassin du jeune caldoche Yves Thual, tué le 11 Janvier. Maurice Moindou, un Mélanésien de 19 ans, était sous le coup d’un mandat d’amener depuis le mois de mars.
nuit du lundi 2 au mardi 3 décembre
Un attentat non revendiqué a ravagé le palais de justice de Nouméa. Il n’y a pas de victime mais les dégâts sont si importants que le bâtiment devra probablement être rasé avant d’être reconstruit.
lundi 30 décembre
Les douanes néo-zélandaises ont saisi dans le port d’Auckland du matériel militaire (8 000 cartouches, pièces détachées d’armes automatiques) à bord d’un cargo français. L’Ile-de-Lumière fait la navette entre l’Australie (où aurait été embarquée la marchandise), la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie. C’est la troisième fois qu’un tel trafic est découvert en quelques mois entre l’Australie et la Nouvelle-Calédonie, un territoire où la vente de munitions est actuelle interdite.